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vendredi 27 juin 2008

Pêcheur de perles musicales (8) : Schubert, Winterreise


Il faut mériter les Lieder de Schubert : dépasser le caractère aride de la voix, de la langue allemande et du piano seul les accompagnant, garder l'esprit et l'oreille disponible, aller le plus loin possible dans l'écoute... Mais, quelle récompense esthétique au final, même si on y arrive pas du premier coup, car il faut un peu de temps pour dégager l'oreille des orchestrations richissimes auxquelles elle est habituée.



J'aime me laisser aller au fil des 24 pièces du "voyage d'hiver" (Winterreise), que j'écoute en général de bout en bout sans pouvoir faire autre chose, ou en voiture. Oui, je sais : on a les plaisirs qu'on peut.

Il y a pour moi chez Schubert - mort à trente et un ans, cela a son importance, une année après cette composition - une charge émotionnelle immense que je retrouve dans toute sa musique, et pourtant, je n'ai pas le goût romantique ! Schubert traduit le côté le plus sombre et le plus tragique de l'âme humaine : l'absurde désespoir d'être au monde sans savoir pourquoi, l'absurde et sombre plaisir aussi. Winterreise, le voyage d'hiver, est comme la quintessence de ce Schubert là.

Des sites entiers sont consacrés à ce cycle, et des analyses par pages entières. L'économie des moyens rapporté à la richesse des sentiments évoqués est absolument fascinante. A ce titre, l'interprétation de ces morceaux est d'une technicité et d'une exigence impitoyable : il faut tout maîtriser de l'intonation, du tempo, du timbre, pour l'ajuster en permanence aux textes mis en musique, écrits par un contemporain de Schubert, Wilhelm Müller, mort l'année même de l'écriture du Winterreise, une année avant Schubert, et à peine plus âgé que lui. Ces deux là auront beaucoup donné à la culture humaine au court de leurs brèves existences.



Pour illustrer cela, d'abord le premier Lieder du cycle, Gute Nacht, chanté par son interprète de prédilection, Dietrich Fischer Dieskau, ici filmé dans les années 80. Incontournable, même si je préfère la version suivante, moins altière, plus humaine et, pour tout dire, plus moderne, de Cristoph Pregardien (accompagnement : Andreas Staier), à la voix précise, claire, bien timbrée, dans une version de 1999.

Enfin, pour se laisser aller, les douze premiers Lieder par Randall Scarlatta, disponibles gratuitement sur le site internet de l'exceptionnel musée Isabella Sewart Gartner de Boston, qui propose de nombreux concerts en plus de la visite de ses collections et de son bâtiment exceptionnel, et qui vaut, pour tout cela, vraiment une visite, virtuelle ou réelle.

Gute Nacht

Fremd bin ich eingezogen,
Fremd zieh' ich wieder aus.
Der Mai war mir gewogen
Mit manchem Blumenstrauß.
Das Mädchen sprach von Liebe,
Die Mutter gar von Eh', -
Nun ist die Welt so trübe,
Der Weg gehüllt in Schnee.

Ich kann zu meiner Reisen
Nicht wählen mit der Zeit,
Muß selbst den Weg mir weisen
In dieser Dunkelheit.
Es zieht ein Mondenschatten
Als mein Gefährte mit,
Und auf den weißen Matten
Such' ich des Wildes Tritt.

Was soll ich länger weilen,
Daß man mich trieb hinaus ?
Laß irre Hunde heulen
Vor ihres Herren Haus;
Die Liebe liebt das Wandern -
Gott hat sie so gemacht -
Von einem zu dem andern.
Fein Liebchen, gute Nacht !

Will dich im Traum nicht stören,
Wär schad' um deine Ruh'.
Sollst meinen Tritt nicht hören -
Sacht, sacht die Türe zu !
Schreib im Vorübergehen
Ans Tor dir: Gute Nacht,
Damit du mögest sehen,
An dich hab' ich gedacht.

(traduction française ici)








Randall Scarlatta

vendredi 20 juin 2008

Jeux olympiques : attention aux Grecs qui manifestent !


John et Nancy m'envoient cet article du New York Times du 12 avril dernier à propos des jeux olympiques. Il mérite une traduction, que voici.

Attention aux Grecs quand ils manifestent !

Tony Perrottet
New York Times
12 avril 2008

S'agissant de protestations à propos des jeux olympiques, les manifestants de Londres, Paris ou San Francisco sont plutôt un peu fleur bleue si on les compare aux anciens grecs. A l'époque classique en effet, les protestataires savaient vraiment comment désorganiser une cérémonie olympique.

En 364 avant J.C., des soldats ont envahi le stade d'Olympie et une belle bagarre eut lieu. Il s'est agi de la collision la plus dramatique de l'histoire entre la politique et le sport. L'organisation des jeux, selon Xénophon, avait été enlevée des Elians, ceux qui habituellement invitaient, et remise aux Pisans, une peuplade voisine – et les Elians n'étaient pas contents. Ils ont décidé d'envahir la fête pendant son point d'orgue, quand des milliers de spectateurs venus de toute la Grèce assistaient joyeusement à une compétition de lutte.

Les Pisans et leurs alliés les Arcadiens firent retraite dans le sanctuaire sacré d'Olympie, disposant leurs archers sur son toit, mais les Elians prirent l'avantage et des combats au corps à corps s'ensuivirent dans l'enceinte sacrée dédiée à Zeus elle-même.


Les amateurs de sport n'en ont pas été émus. Selon Diodore, la foule « portant encore ses habits de fête et des guirlandes de fleurs dans les cheveux » ont observèrent les combats de leur place, « en applaudissant impartialement les performances de chaque côté »

Cette violente manifestation eut des suites notables. Les Elians ont été contraints de se retirer, mais les jeux suivants se sont déroulés à nouveau sous leur contrôle.

Aujourd'hui, nous admirons l'ancien idéal olympique, placé au dessus des rivalités. Les grecs avaient institué en effet une « trêve sacrée » pour permettre aux athlètes et aux spectateurs de se déplacer pour les jeux, ce qui était quelque chose, dans un pays constamment agité par les guerres intestines. Cela dit, ils ne respectaient pas toujours cet idéal.

Il y eut des embargos et boycottages. Les Spartiates ont été interdits de jeux olympiques en 420 avant JC, pendant la guerre du Péloponnèse (un spartiate qui s'était clandestinement invité aux jeux fut fouetté pour cela). Vingt ans après, Sparte a créé à nouveau d'autres troubles en organisant une campagne guerrière en pleine trêve sacrée. Elle en fut taxée d'une « mine » par soldat impliqué dans la campagne, l'équivalent aujourd'hui peut-être de 5 millions de dollars. Et en 380 avant JC, les athéniens boycottèrent les jeux quand un de leur athlètes fut scandaleusement convaincu de corruption – ce qui n'est vraiment pas la cause la plus noble.

Même durant des temps plus pacifiques, la politique était toujours là, avec des orateurs qui haranguaient les immenses foules pour l'occasion. En 388 avant JC, un orateur du nom de Lysias parla contre le tyran Denys de Syracuse, arrivé sur place avec un équipage plutôt tapageur, ce qui provoqua la mise à sac du luxueux campement royal par les amateurs de sport déchaînés.

Cependant, ces mouvements de protestation étaient des exceptions à la règle. Aujourd'hui, nous sommes toujours en admiration pour les anciens jeux qui se sont tenus régulièrement tous les quatre ans pendant plus de dix siècles. Par comparaison, nos jeux olympiques modernes ont été annulés trois fois au cours de leur courte histoire pour cause de guerre : en 1916, 1940 et 1944.


Qu'est-ce qui pose problème de nos jours ? Peut-être déjà cette idée moderne de localiser les jeux dans un pays différent à chaque fois. Dans l'antiquité, ils se tenaient toujours au même endroit : en ce lieu sacré qu'était Olympie, dans un coin reculé du Péloponnèse – et ils étaient organisés toujours par les mêmes hôtes, à l'exception du pépin notable de l'année 364 avant JC. Ce système avait un avantage remarquable : les Elians étaient une peuplade sans importance politique et ils se tenaient la plupart du temps à l'écart des grands conflits qui divisaient la Grèce à l'époque.

Peut-être pourrions nous court-circuiter les sempiternelles protestations concernant nos jeux olympiques en leur choisissant un lieu d'accueil permanent, chez une nation que personne ne pourrait sérieusement contester comme le Liechtenstein, la Nouvelle Zélande ou l'Etat indépendant des Samoa. Avec un hôte permanent identique, les cérémonies d'ouverture des jeux ne pourraient plus être utilisées comme démonstration de fierté nationaliste.

Une fois l'hôte permanent sélectionné, il s'agirait de n'en jamais choisir un autre pour éviter ce qui s'est passé avec les Elians. Le spectacle des jeux pris d'assaut par des Liechtensteinois enragés serait trop difficile à supporter.

Tony Perrottet est l'auteur de « Les jeux olympiques dévoilés » et prochainement de « Napoléon en privé »

mercredi 18 juin 2008

Série "trompe l'oeil" (2) : les plafonds

On ne manquera évidemment pas de mentionner les plafonds de la Chapelle Sixtine ou la Galerie des Glaces comme monuments absolus des plafonds en trompe l'oeil, sans compter les innombrables et éternelles montées aux cieux des dieux de toutes sortes qui décorent les plafonds de tant de pièces dans les châteaux d'Europe.

Voici pour l'heure quelques spécimens dans divers genres.

Palais Pitti, Florence
(Photo
Antonio Quattrone, Florence)


Hôtel Ferraris, Nancy
(Photo conseil régional de Lorraine)

Publicité pour Adidas, Gare de Cologne, 2006


Résidence des Rois de Bavière, Munich
(Photos personnelles)