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lundi 19 septembre 2022

Les séries de la fin de l'été : Indian Summers, Mozart in the Jungle, Irma Vep, Upload, Les Mystères de Prague

C'est du lourd pour cette sélection de la fin de l'été... Le creux de l'été a permis enfin de se plonger dans deux grandes séries laissées de côté pendant un temps : Indian Summers et Mozart in the Jungle. 

Et on a ajouté deux séries notables toutes récentes dont l'avenir n'est pas encore fixé : Irma Vep et Upload.

Ce n'est pas toujours le cas, mais cette fois, les quatre séries sont anglophones : trois d'entre elles sont américaines, Indian Summers étant anglaise.

Et comme joker, comme pour se décentrer, on parlera aussi parler de la série tchèque Les Mystères de Prague, Cela aurait été dommage.

Mozart in the Jungle n'était pas oubliée : les mélomanes ne pouvaient pas l'ignorer. D'autant qu'il existe très peu de séries qui traitent de la musique classique.

On n'a pas été déçu, au contraire : cette série est une formidable leçon de pédagogie sur le statut de musicien professionnel classique, le fonctionnement d'un grand orchestre et sur les enjeux liés à la production et la diffusion de la musique - à l'exception toutefois des enregistrements des disques, qui sont ignorés par la série, mais sans dommage car elle est déjà suffisamment dense comme cela !

Dans ce tel contexte, on peut pardonner quelques facilités dans les intrigues, des digressions un peu longues et quelques invraisemblances.

La série permet de passer en revue l'ensemble des instrumentistes, à l'exception toutefois des cuivres, qui sont tout à fait inconnus. Dommage. 

L'idée de confier le personnage principal féminin à une jeune hautboïste est une excellente idée, car l'instrument, essentiel, est pourtant souvent inconnu du grand public, et il nous permet tout de suite d'être au cœur de l'orchestre.

Les principaux acteurs sont bien choisis et excellents. On apprécie aussi beaucoup les gros moyens octroyés par Amazon, qui arrêtera pourtant la série après la 4° saison, chacune de 10 épisodes d'une demi-heure - format souvent utilisé pour une comédie. Audience trop faible oblige.

Manifestement, la série aurait sans doute pu être devenue un grand classique des séries, ce qui explique aussi qu'elle a été confiée à de grands noms de la réalisation américaine, en tête Roman Coppola, le fils de son père, et Jason Schwartzman, un autre membre de la famille Coppola.

Enfin, on profite aussi beaucoup de la bande originale : c'est une une belle anthologie de la musique classique, surtout lyrique et symphonique.

Et sur le marché, on trouve dans certains épisodes des musiciens ou compositeurs réellement existants, jouant leur propre rôle, ce qui est assez amusant.

Mozart in the Jungle reste une série assez singulière dans son genre. En effet, si on trouve pas mal de séries sur le monde de la danse, la musique classique semble encore assez éloignée des fictions télévisuelles. Dommage.

Plusieurs fois diffusée sur Arte, et cette fois à l'occasion du 75° anniversaire de l'indépendance de l'Inde, Indian Summers, qui traite de la montée vers la partition et l'indépendance des Indesdevait sans doute empiler les saisons, puisque le récit de la première saison se situe en 1932, le terme des événements étant bien sûr fixé à 1947.

Magnifiquement et somptueusement mise en scène, la série s'est arrêtée dès la deuxième saison, faute d'audiences suffisantes : elle est produite par Channel 4, dont 91% de son budget vient de la publicité. CQFD.

Evidemment, on ne boude pas son plaisir et on regarde jusqu'au bout. Mais on reste sur sa faim.

Les événements de cette histoire sont innombrables et souvent tragiques, qui ont mené à l'indépendance de l'Inde et du Pakistan et concerné plusieurs centaines de millions d'êtres humains à l'échelle d'un sous-continent immense..

Difficile de tenir cette histoire dans un mouchoir de poche. 

La série essaie : le cadre est censé se situer sur les contreforts de l'Himalaya, pour que les Européens anglais puissent ne pas trop souffrir des étés indiens, chauds et humides de la plaine. Dans les faits, la série a été tournée en Malaisie, d'où on aperçoit pas du tout le toit du monde.

De même, impossible de reconstituer la réalité de l'Inde dans les années 1930. Bref, les décors semblent un peu étriqués et répétitifs.

De surcroît, c'est une petite société qu'on nous dépeint, sans doute très éloignée des armées de fonctionnaires que sa Majesté envoyait sur place pour administrer ces territoires énormes.

La série tente aussi de donner une idée de la société indienne de l'époque, gérée par les castes, déchirée entre musulmans et hindous et agitée par les différents mouvements politiques qui la traversent : révolutionnaires ou réformistes, violents ou non-violents... Mais elle ne peut évidemment pas étreindre cette diversité et cette complexité.

Du coup, les intrigues paraissent bien futiles et les personnages falots, comme flottant dans des habits trop larges. 

Sauf peut-être les personnages indiens, qui évoluent dans des extérieurs plus larges que quelques maisons coloniales.

Dommage pour l'ensemble. Mais on comprend aussi pourquoi il n'y a jamais eu de troisième saison.

Avec Irma Vep, nous sommes dans la meilleure qualité siglée HBO, et co-produite par des moyens français (OCS - Orange Cinéma Séries). De même, l'histoire des Vampires (anagramme d'Irma Vep), film muet bien français de 1915, sert de trame pour cette mini-série de 8 épisodes de 56 mn chacun.

Si Mozart in the Jungle donnait une leçon de musique classique, Irma Vep nous donne à regarder la fabrication d'un film avec ses coulisses, ses déboires et ses petites et grandes histoires - pétage de plomb du réalisateur inclus.

On aime ce cinéma dans le cinéma et ce méli-mélo international, langues et acteurs compris. 

Le nom d'Alicia Vikander doit être mémorisé. C'est celui de la jeune actrice suédoise qui joue le rôle de Musidora

Elle a déjà une énorme filmographie, et sans aucun doute, elle sera un jour bien mieux connue en France, car sa présence et son jeu sont remarquables.


La vie numérique prolongeant la vraie vie est devenu un thème récurrent dans nombre d'oeuvres de science-fiction. 

Upload en fait partie, mais sur le mode de la comédie. On compte deux saisons, et Amazon, qui produit la série, a commandé une troisième. Tant mieux.

Si le thème commence à être connu, son traitement par la série est très intéressant : l'environnement numérique à venir (supposé de 2033 dans la série) est parfaitement crédible : smartphones dématérialisés, automobiles autonomes, trains hyper-loop, imprimantes 3D pour la nourriture, et même pour son café... Les amateurs aimeront !

Il faut y jeter un coup d'œil., ne serait-ce que pour savoir ce qui nous attend bientôt en matière de vie quotidienne.

Pour le reste, les acteurs sont plutôt bons et les rebondissements sont bien tournés. On attendra la troisième saison.


La première chaîne tchèque a fait fort avec Les Mystères de Prague, qui reconstitue dans les moindres détails le Prague des années 1920. Elle ne lésine pas sur les décors : automobiles d'époque, scènes extérieures très nombreuses, reconstituant des quartiers ou des coins de campagne complets,  intérieurs et costumes des années folles assortis... On est comblé !

Mais la série a aussi d'autres intérêts. 

Historiquement, cette période de la Tchécoslovaquie fut singulière, coincée entre trois Empires. D'abord, l'Empire Austro-Hongrois jusqu'au 1918 dont elle faisait partie, puis le sinistre Troisième Reich, qui a annexé une partie du pays en 1938, avant d'être intégrée dans l'Empire soviétique.

La série se passe pendant ces vingt années prospères de la République. Ce n'est pas par hasard. Et les premiers épisodes font écho à la situation politique du pays, divisé entre républicains et nostalgie de l'Empire d'Autriche-Hongrie.

Ensuite, on regarde les personnages principaux vivre de manière intéressante, chacun dans son monde, chacun pourtant ne s'empêchant pas de faire des incursions dans le monde de l'autre.

Mais attention, les afficionados de fictions policières seront déçus car les intrigues sont un peu redondantes et téléphonées. Mais cela n'empêche pas d'apprécier la belle époque à Prague... et de sa banlieue. 

mardi 23 août 2022

Lieux singuliers (11) : Le Cimetière protestant de Nîmes


Lieu singulier à plusieurs titres que le cimetière protestant de Nîmes, qui connut sa première inhumation le 22 juillet 1782.

Si les morts sont aussi encombrants que les vivants, s'agissant notamment des sépultures et de leur entretien, les morts protestants le furent encore plus dans le Royaume très catholique depuis 1685, année de la révocation de l'Edit de Nantes. 

Que faire des défunts de confession protestante ? C'était particulièrement d'actualité à Nîmes, compte tenu de la longue histoire qui unit le protestantisme et sa contrée, si proche des Cévennes.

Alors on les enterrait à l'aube ou à la tombée de la nuit, comme en catimini, dans les cimetières existants. 

Jusqu'à ce que l'on interdise les inhumations dans les villes en 1776, et pour tout le monde. 

C'est que les cimetières "urbains" étaient une vraie horreur : on y empilait les corps dans des espaces exigus depuis le moyen âge, et qui finissaient s'écrouler, endommageant les maisons des vivants riverains ou, pire, dans leurs caves, provoquant des effondrements pestilentiels.

Les autorités protestantes du lieu ont alors profité de l'occasion pour donner à Nîmes un vrai lieu de repos des âmes de leur ressort.

Quelques autres cimetières protestants sont arrivés par la suite ailleurs au début du XIX° siècle, mais celui de Nîmes reste le plus important, comptant environ 6 000 sépultures, dont environ un tiers reste actif, car il est encore en activité.

A la grande différence des cimetières usuels, ce cimetière est resté privé, caché dans les méandres de l'histoire des relations Etat-Eglise. Il a été classé Monument historique en 2001.

Il reste un lieu foisonnant de végétation, comme indomptée, où tant de familles ont pu trouver un dernier refuge enfin paisible. 

Pour autant, le cimetière est traversé à son milieu par un cadereau qui a charrié tant d'eau le 3 octobre 1988, comme tous les autres les cours d'eau déboulant dans la ville, qu'elle en fut noyée.

Ce dernier 23 aout 2022, on avait en mémoire le 450° anniversaire de la Saint Barthelemy. Dix ans plus tôt en Champagne, on avait déjà massacré des familles protestantes en masse à Wassy.

Les images sont ici



vendredi 8 juillet 2022

Sur la Playlist de l'été : Haendel, les concertos pour orgue et orchestre

 

De quoi se réconcilier enfin avec l'espèce humaine : les concertos pour orgue et orchestre de Haendel...

D'abord, parce qu'il s'agit du grand Haendel, un des immenses piliers de la musique baroque à son apogée ; l'égal de Bach, Telemann, Scarlatti, Rameau...

Ensuite parce que Haendel est singulier : il n'était pas né dans une famille de musiciens, alors que c'était plutôt la règle à l'époque.

Orphelin à quatorze ans, son père devient apprenti chirurgien-barbier au centre des pays germaniques. Le grand père était chaudronnier : ascendance tout à fait atypique.

Parcours étrange aussi : destiné à une carrière juridique, c'est en cachette de son père qu'il est devenu le plus grand organiste de son temps. On disait que seul Bach l'égalait, et ce n'est pas rien.

Enfin, ces concertos pour orgue et orchestre ne sont pas des oeuvres religieuses. Ils étaient joués pendant les interludes lors des grands oratorios composés par Haendel à Londres, où il s'était finalement installé de manière durable après une parenthèse italienne, venant de sa province germanique.

Au final, ces concertos étaient comme des coupures publicitaires pour ses prochains oratorios : c'est que le grand Haendel, champion de l'orgue, avait de quoi attirer un public supplémentaire important. Pas mal, comme spot de pub.

L'orgue est la vedette de ces pièces, l'orchestre étant destiné à le mettre en valeur mais jamais l'égaler.

Ces pièces courtes - par définition - se jouaient sur des petits orgues mobiles dans de grandes salles dédiées à la musique. Elles profitaient de l'orchestre et de l'installation des grands oratorios pendant les changement d'installation ou de décor. Mais de nos jours, les enregistrements se font aussi dans les églises, car on trouve peu d'orgues ailleurs et les orgues mobiles sont aussi rares.

Cette douzaine de pièces sont formidables : légères, aériennes, virtuoses, d'une expressivité incroyable.

S'y ajoutent des tonalités quasi enfantines car les orgues interprétant cette musique utilisent souvent des jeux d'orgue qui ressemblent à ceux des petits orgues mobiles de l'époque, plutôt aigus, délicats, célestes. Les plus avertis reconnaitront notamment les jeux de flute, voix céleste, viole de gambe, flute traversière, hautbois, voix humaine, trompette, bombarde, clairon, cromorne...

Voici d'abord deux extraits du même morceau, représentatif du rôle de l'orgue dans ces concertos. La première vidéo de 1973 utilise un orgue moderne dont la sonorité est magnifique et bien adaptée au morceau. Cet instrument se trouve à Manchester, dans l'auditorium du conservatoire de musique. La deuxième est un enregistrement de référence de 1986 venu des Pays-Bas.



Et pour donner une vue d'ensemble de ces concertos, voici une intégrale proposée gratuitement par Brilliant Classics. Quelques oeuvres de même facture, notamment un concerto pour harpe, sont ajoutés. Pour l'ensemble, nous sommes partis pour un peu moins de 4 h 30 mn. Bonne écoute !



On peut écouter aussi la première partie des concerts par Marie-Claire Alain, grande organiste, qui fait référence :


Et une version historique de Karl Richter, filmée en 1972, avec l'ensemble de Munich. Le tempo est un peu lent pour les oreilles de 2022, mais elle peut faire référence aussi.