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dimanche 25 octobre 2020

Les séries d'octobre : The Killing, Hinterland, Rebellion

Trois belles séries européennes bien enracinées dans leur terroir européen et produites dans les trois cas par le service public de télévision respectif de chaque pays concerné - est-ce un hasard ? - pour octobre : Copenhague, Dublin et le Pays de Galles.

Produite par DR1première chaîne danoiseThe Killing (Forbrydelsen, littéralement « le crime », en danois) présente 40 épisodes sur 3 saisons, la première comportant 20 épisodes de 55 minutes, pas moins. 

Cela laisse le temps de fouiller l'intrigue, de présenter les personnages principaux et d'enraciner la narration dans une réalité crédible, celle de la société sociale et politique du Danemark actuel. L'ensemble est réussi, et les spectateurs danois, anglais et français ont adhéré à cette série pourtant sans effets extraordinaires : près de 600 000 spectateurs en aout 2012 sur Arte lors de sa première diffusion. Pas mal.

On ne détaillera pas les récits, car il s'agit d'une série policière dont il importe de ne pas entamer le suspens. 

Mais un peu souligner deux points principaux au moins pour expliquer le succès : l'actrice principale (Sofie Gråbøl) et l'aller et retour permanent entre le milieu politique et les avancées des enquêtes.

Principal personnage, Sarah Lund, porte sur ses épaules les enquêtes quoi qu'il en coûte et tout y passe : vie familiale (mais c'est très souvent dans les thrillers), amitiés professionnelles et personnelles, promotion professionnelle et même garde-robe et coiffeur... C'est le cas pour d'autres personnages d'autres séries, comme par exemple le Capitaine Laure Berthaud (Caroline Proust) dans Engrenages.

Mais nous sommes au Danemark et non en France ni aux Etats Unis : l'héroïne est taiseuse et souvent impénétrable. Les mots ne l'aident pas : elle préfère agir, imperturbablement, laissant souvent en plan ses collègues, ses interlocuteurs, ses chefs.. entrainant avec elle le spectateur dans son monde et celui-ci la suit, d'autant que ses intuitions sont évidemment les bonnes. On aime.

D'autre part, les enquêtes croisent vite les gouvernants de la capitale danoise et ceux du pays - c'est un petit pays. et nous retrouvons le jeu compliqué des coalitions politiques des différents partis politiques qui forment un gouvernement, municipal ou national, parfaitement inconnu en monarchie élective comme est bien la France. Sur ce plan, on pense inévitablement à Borgen.

Il est pourtant presque étonnant de trouver dans cette démocratie exemplaire le mensonge, la dissimulation, la trahison, le souci de bien communiquer comme partout où les êtres humains exercent un pouvoir sur les autres. Une démonstration de Realpolitik au passage. On en demandait pas autant, mais on accepte le divertissement. 

Produite par la BBC Cymru WalesHinterland/Y Gwyll partage beaucoup de points communs avec The Killing : principaux personnages taciturnes, narrations très élaborées issues souvent d'un passé humain douloureux individuel ou collectif, pressions hiérarchiques sur les enquêtes... 

Mais nous sommes cette fois à la campagne XXL : les magnifiques paysages côtiers et venteux du Comté de Ceredigion au Pays de Galles ne peuvent pas en cacher l'extrême dénuement, territoire vidé d'habitants, de services, d'économie, d'avenir.

Mais au moins une culture millénaire est-elle présente : la langue galloise - cousine du breton, pour dire vite - est partout. Elle est utilisée encore par 20% de la population, et les acteurs de la série - gallois - savent prononcer justement les noms de lieu ou de personnes, si étrangers aux oreilles des locuteurs des langues latines ou anglo-saxonnes. 

Cet environnement compte beaucoup dans l'intérêt de la série, qui a d'ailleurs été diffusée en son temps par toutes les chaînes TV locales en Bretagne et... en breton.

Attention, nous sommes sur un format inhabituel : 1 h 30 par épisode. La série en compte 13 épisodes répartis en 3 saisons. Tout comme The Killing, le format permet de fouiller partout dans tous les aspects des enquêtes, même si on en sait beaucoup moins sur la vie des policiers que sur leurs suspects, même si des éléments arrivent au fil des saisons.

Les deux inspecteurs, principaux personnages, forment un couple étonnant - Tom Mathias (Richard Harrington) et Mared Rhys (Mali Harries)  dont le jeu est tout en non-dit, chacun essayant d'apprivoiser l'autre, même si les enquêtes l'emportent toujours au final.

Produite par le service public de radiodiffusion et télévision en Irlande, RTE, Rebellion nous fait traverser la mer d'Irlande. La Rebellion, c'est en fait la guerre d'indépendance de l'Irlande, si mal connue ici. 

Comme dans la vraie histoire, la première saison met en scène la grande insurrection de Pâques 1916début de cette vraie guerre de libération, alors que l'Europe est évidemment occupée à d'autres choses sur le continent.

La mini-série - deux saisons de 5 épisodes - endosse évidemment le point de vue irlandais, et dépeint assez les horreurs d'une guerre anticolonialiste et multiséculaire en étant apparemment fidèle aux faits et aux mentalités de l'époque, et la reconstitution historique est réussie. 

Un personnage de la série, anglais, déclare Vous allez donner un pays qui était le nôtre depuis 1014 à un instituteur ? L'Irlande était rattachée à la couronne britannique depuis cette date : c'est dire le ressentiment, l'animosité, les rancœurs accumulés à surmonter.

C'est l'occasion de se donner en effet quelques repères sur l'histoire de l'Irlande, qui ne fut certainement pas un long fleuve tranquille, l'Angleterre remplissant parfaitement son rôle de superpuissance hégémonique et impitoyable.

Et, dès qu'on prend pied dans cette histoire, on est submergé par une énorme admiration : les personnages qui ont guidé la guerre jusqu'à l'indépendance étaient remarquables - dont certains sont morts dans les années 70 du XX° siècle - ce n'est pas si loin dans le temps. Ils ont préparé et organisé cette révolution clandestinement, comme en territoire ennemi - qui était pourtant le leur. La série leur donne visage et hommage. Elle permet aussi de se poser concrètement une question pratique et importante : comment construire secrètement un nouveau pays à partir de zéro tout en préparant une guerre ? Bon courage.

Pour finir, on signale la tout nouvelle série allemande Barbares, qui traite de l'occupation romaine en Germanie, et notamment de la bataille de Teutobourg qui fut un désastre pour les légions, et qui a marqué l'arrêt de la conquête romaine au nord de l'Allemagne actuelle. 

Compte tenu de l'époque lointaine, on s'attendait à une série folklorisante et remplie d'anachronismes : mais que nenni ! Les Romains y parlent vraiment un beau latin, la reconstitution de l'époque est convaincante et les personnages semblent crédibles dans leur rôle. A suivre.

jeudi 1 octobre 2020

Sur la Playlist de ces jours-ci : les Variations Goldberg, de Bach


Les Variations Goldberg font partie de ces oeuvres qui accompagnent une vie complète. Elles durent une heure, à quelques secondes de plus ou de moins selon les versions. On les trouve interprétées au piano ou au clavecin.

C'est une oeuvre tardive de Bach, au moment où ses mécènes lui laissaient un plus de temps que préparer la messe du dimanche suivant, les cantates dominicales étant son fardeau,  malheureusement pour lui, heureusement pour nous. On en a retrouvé pas moins de 230, mais c'est une autre histoire.

Goldberg est un élève de Bach, musicien de l'entourage du Comte Herman Karl von Keyserling, ambassadeur russe auprès de la Cour de  Saxe, à Dresde, un des si nombreux Etats allemands de l'époque. C'est lui qui a donné son nom à l'oeuvre, dont elle fut sans doute le premier interprète.

Les Variations Goldberg sont inséparables du sommeil : on raconte qu'elles ont servi à endormir le Comte Keyserling, son commanditaire insomniaque. Et à les écouter, on veut bien y croire. 

Oui, on a le droit de s'endormir en écouter les Variations Goldberg : toutes en douceur, en finesse et en harmonie, elles donnent l'impression que les idées et les émotions de la journée passée se rangent dans l'esprit d'elles-mêmes, à leur juste place et proportion.

C'est la récente interprétation du pianiste chinois Lang Lang,  qui ne les avait jamais enregistrées, qui nous vaut cette publication de ce jour.

En voici cinq minutes. Cette interprétation est lente et subtile, et on aime, plutôt que certaines versions qui transforment l'oeuvre en choisissant un tempo bien trop rapide, du coup très éloigné du rythme d'une berceuse et qui, hélas, fracasse la légende. Car on y croit : les Variations sont bien le somnifère le plus chic qui soit - et le plus inoffensif.

Une quarantaine de minutes de l'interprétation de 1955 du grand Glenn Gould suivent, très lente aussi.

Enfin, pour hiérarchiser les très nombreuses versions et si on veut creuser,  on peut se référer à cette page

C'est la version de Zhu Xiao-Mei, d'origine chinoise mais maintenant française, qui est la meilleure selon ce jury. Intéressant : une de ses interprétation intégrale est disponible gratuitement sur internet. Du coup, on l'a ajouté.