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mercredi 29 novembre 2023

Sur la Playlist de la fin de l'automne : Jan Dismas Zelenka, le bohémien malheureux

 

Peu de monde connait Zelenka ici et c'est dommage. Né en 1679, mort en 1745, C'est un contemporain de Jean-Sébastien Bach : ils se sont rencontrés d'ailleurs. Et on sait de Bach appréciait sa musique, ce qui est un bon présage.

Originaire d'une petite bourgade proche de Prague, Zelenka est arrivé dans la trentaine à la Cour de Dresde, dont on a vu récemment l'importance politique et culturelle à l'époque et il n'en pas parti beaucoup, hormis quelques excursions vers les capitales proches : Vienne, Venise et Varsovie, Prague. Il n'a jamais été jusque Versailles, même si le souverain de Saxe à l'époque était un des rares alliés du Grand Roy en Europe.

Malgré sa longue résidence en Saxe, il semble n'avoir pas été reconnu à la hauteur de son talent : les postes les plus prestigieux lui ont échappé tout au long de sa carrière.



Son malheur se poursuit jusqu'au XX° siècle puisque les originaux de ses partitions ont été brulées dans le bombardement de Dresde à la fin de la deuxième guerre mondiale.

Mais on connait sa musique grâce à des copies, diffusées au fil des siècles car celle-ci a été progressivement reconnue et appréciée.

Le catalogue de ses œuvres compte 250 œuvres, majoritairement religieuses car il a été affecté aux églises de la capitale saxonne.

Toutefois, sa musique de chambre arrête l'oreille : il fait partie de ses compositeurs dont on reconnait les œuvres à l'écoute, même par un non-spécialiste. C'est une musique vive, joyeuse, colorée. Le contraire du penchant naturel de son compositeur.

L'enregistrement de la musique de Zelenka  a trouvé tout naturellement dans le grand torrent des découvertes de la musique baroque, notamment tchèque, depuis une cinquantaine d'années.

L'ensemble de ses œuvres sont disponibles de manière ordonnée sur YouTube, ce qui est un fait remarquable sur ce lien.

Voici quelques œuvres en musique de chambre.



Et en matière de musique vocale, voici trois arias qui valent l'écoute, toutes les trois interprétées par Jakub Józef Orliński, le contreténor qui monte, monte, monte. On passera sur les facéties médiatiques d'un des clips (il est produit pour Warner...) : sa magnifique voix et sa maîtrise vocale rachètent largement ses penchants médiatiques. 




dimanche 2 juillet 2023

Solide et baroque Saxe



A l'instar de nombreux territoires allemands, la Saxe a connu de plusieurs régimes, désignations et rattachements au fil de l'histoire. Pour autant, sa permanence au fil des siècles est malgré tout remarquable, depuis le moyen-âge jusqu'à notre époque.

Ainsi les Ducs sont-ils devenus Rois par la grâce de Napoléon Ier, dont ils étaient parmi les rares alliés du premier Empereur français en Europe. Signe déjà d'un tempérament solide et affermi de ses Ducs, et, partant, de sa population, alors que tout le monde haïssait le tyran français...

Et ces Ducs ont laissé pour la postérité des réalisations de première qualité en matière architecturale et culturelle, comme l'indique la physionomie des deux grandes villes quasi jumelles que sont Dresde et Leipzig.

Voici pourquoi il faut visiter la Saxe, et notamment pour ceux qui ont le goût baroque, comme on verra pourquoi.

Il faut visiter aussi la Saxe comme partie de la défunte "RDA"... Les guillemets permettent de ne pas trop offusquer les amis allemands, qui ne voulaient pas que l'on parle de "DDR", dénomination qui pointait immédiatement la spoliation communiste de la "Zone" - sous entendre "la Zone occupée par l'URSS"... Mais c'est une autre époque.

Comme souvent à l'Est de l'Europe, le communisme soviétique a au moins épargné les centres villes anciens tels quels, notamment non défigurés par les hideux immeubles acier-verre des années 70 qu'on trouve partout dans les villes de l'Ouest. Hélas.



Ville martyr après les lourds bombardement de la fin de la deuxième guerre mondiale, le centre ville de Dresde a été reconstruit à l'identique, y compris la Frauenkirche - Eglise Notre Dame, de culte luthérien - réinaugurée le 30 octobre 2005. Symbole de la réunification pour beaucoup, il fallait attendre le fin du régime communiste pour la reconstruire. On le voit, la Frauenkirche est très loin de l'austérité des lieux habituels du culte protestant. En Saxe, même le protestantisme est baroque !

La Frauenkirche est au final la dernière pièce d'un des plus beaux paysages urbains d'Europe, vu de l'Elbe, façonné pour l'essentiel au cours du XVIII°.

Quant à Leipzig, nous sommes dans la ville où a exercé de Jean-Sébastien Bach pendant 23 ans, comme Cantor de l'église Saint Thomas. A cette période de début juin se tiennent les Journées Bach : raison de plus d'y passer un peu de temps.

La visite de Leipzig nous immerge partout dans la musique entre Eglises, Gewandhaus et Opéra. Mention particulière pour le Gewandhaus, dont le chef permanent de l'orchestre s'appelait notamment Félix Mendelssohn, puis Wilhelm Furtwängler, Bruno Walter, Kurt Masur... Et c'est là où l'on a créé des œuvres de Beethoven, Schubert, Schumann, Brahms et Bruckner. Quand même.

Un tour au Musée des Beaux Arts de la ville nous replonge aussi dans les années du régime soviétique : les collections contemporaines en sont directement marquées, comme les images permettront de s'en rendre compte. 

Très intrigants, très intéressants que ces tableaux qui peignent ce grand ciel bleu, vu par tous, partagé avec le monde entier mais inaccessible à la population de l'époque.

Pour finir, un tableau de Canaletto - qui a été invité ici par les Ducs, quelle bonne idée, non ?  - a donné envie d'aller voir le centre ville de Pirna de nos jours. On s'y retrouve. Comme on s'y est retrouvé à Dresde, quand il s'est agi de reconstruire la ville : les tableaux de Canaletto ont été si précieux, deux siècles après... L'art plus fort que la guerre, en somme.

Mais en plus du Pirna du XVIII° siècle, on y croise facilement les traces de l'ancienne Allemagne de l'Est.

Toutes les images sont ici

mercredi 12 avril 2023

Sur la Playlist du Printemps : les Folies d'Espagne

 Quel succès que cet air, composé et recomposé des centaines de fois depuis le XVI° siècle, dans de tant de variations et d'instrumentation ! 

Les Folies d'Espagne sont apparues sur le papier apparemment en Espagne en 1577, mais des transcriptions de chansons et de danses plus anciennes ont laissé des traces dans l'histoire de la musique du côté du Portugal.

Connue aussi sous son nom espagnol et sans sa forme courte - La Folia - est un vrai grand Tube que tout amateur de baroque a entendu des milliers de fois, sous une forme ou sous une autre, sous la plume des plus grands compositeurs : Vivaldi, Corelli, Scarlatti, Lully, Marais, Bach, Purcell...

Un amateur s'est même amusé à rechercher quarante versions enregistrées des Folies d'Espagne sur son blog.

On peut aussi retrouver des traces de la Folia chez des compositeurs bien plus proches dans le temps comme Liszt ou Rachmaninov.

Et pour faire bonne mesure, les grands succès cinématographiques sur la musique baroque ont bien évidemment annexé la mélodie à leur BO, notamment Le Roi danse ou Tous les matins du monde.

Et comment peut-on expliquer cet engouement ? Facilité de mémorisation ? Prétexte facile à virtuosité instrumentale ? Air appropriable facilement par tous les instruments de l'époque ? Reprises innombrables et rediffusées dans toute l'Europe ? Allez savoir !

Bref, les Folies d'Espagne, sont une vraie folie et faites attention : l'air ne quittera pas vos oreilles de la journée...

Quelques vidéos parmi des centaines, pour se limiter à Marais, Lully et Corelli, qui sont les variations les plus abouties après plus de deux siècles de rengaine. Et pour finir, une version chantée plus ancienne de Henry Le Bailly.






lundi 10 octobre 2022

Sur la Playlist de l'automne : la passacaille


Cette fois, le blog ne parlera pas de compositeur ou d'oeuvre... mais de la Passacailleforme musicale spécifique, commune à de nombreuses pièces de musique mais issues de la période baroque, et utilisée par de nombreux compositeurs, y compris par les plus célèbres.

La Passacaille est donc un trait distinctif du baroque, même si elle a été utilisée par des compositeurs bien plus modernes, mais plutôt comme un hommage à l'histoire de la musique.

On trouve même une passacaille chez les Pink Floyd, c'est dire ! En effet, le quatrième mouvement de la composition A Saucerful of Secrets, issu de l'album de 1967-1968 et qui porte le même nom, est bien une passacaille (Celestial Voices).

Plus proche de la musique baroque, l'oreille du mélomane reconnaîtra à chaque fois la forme musicale passacaille : Bach, Purcell, Pachelbel, Buxtehude, Kerll, Lully...

Et l'histoire de la Passacaille est digne d'intérêt.

Elle s'appuie sur une forme à trois temps accompagnée par une basse obstinée, ou Ostinato, ce qui est caractéristique de musiques à danser.

A ce titre, elle a pénétré tous les milieux sociaux des siècles baroques (XVII° et XVIII° siècles). 

Dans les milieux plus populaires, la Passacaille, plus rapide, est devenue la Gavotte. Dans les milieux nobles, elle est restée plus lente, altière et apprêtée : pas facile en effet de danser avec de lourds habits empesés.

Et on pense aussi à l'histoire de la tarentelle, autre forme musicale et dansante qui a traversé les milieux sociaux et les lieux, et dont le blog a parlé il y a longtemps.

Dans la suite, plusieurs passacailles sont proposées, plus ou moins connues, mais qui permettront de se mettre à l'esprit et à l'oreille ce qu'est LA passacaille.

Une mention particulière pour les deux premières vidéos : il s'agit d'une part de la célébrissime passacaille de l'opéra Armide, de Lully, et d'autre part la passacaille de l'opéra Persée, toujours de Lully. Elles présentent toutes les deux de la danse baroque, discipline un peu oubliée et fort peu produite en public.

Il est étonnant que le renouveau de la musique baroque ne provoque pas encore un renouveau de la danse baroque, qui manie des formes chorégraphiques magnifiques et singulières, qui ont fondé la danse classique. 

De fait, on trouve très peu de spectacles de danse baroque. Mais on peut gager que ce renouveau viendra bientôt.

On trouvera aussi plus bas le célèbre Canon de Pachelbel, qui est aussi une passacaille.

Et à la fin, et pour les amateurs, on a trouvé d'abord cette émission de 17 minutes bien faite et instruite sur la Passacaille.

Lully, Passacaille de l'Opera Armide (1686)

Lully, Passacaille de l'Opéra Persée (1682)

Buxtehude, Passacaille 
pour orgue en ré mineur (1690)

Georg Friedrich Händel, Suite de piano en Sol mineur 
HWV 432 (1720)

Henry Du Bailly, Yo Soy La Locura (1614)

Anonyme, O come t'inganni (1657) 

Johann Pachelbel, Canon et Gigue en ré majeur 
pour trois violons, avec basse continue (1680)

Tarquinio Merula, Chaconne (env.1624)

Purcell, Passacaille de l'Opéra King Arthur (1691)

Yves Fournier, Ca passe ou ça caille... l'histoire de la passacaille !

vendredi 8 juillet 2022

Sur la Playlist de l'été : Haendel, les concertos pour orgue et orchestre

 

De quoi se réconcilier enfin avec l'espèce humaine : les concertos pour orgue et orchestre de Haendel...

D'abord, parce qu'il s'agit du grand Haendel, un des immenses piliers de la musique baroque à son apogée ; l'égal de Bach, Telemann, Scarlatti, Rameau...

Ensuite parce que Haendel est singulier : il n'était pas né dans une famille de musiciens, alors que c'était plutôt la règle à l'époque.

Orphelin à quatorze ans, son père devient apprenti chirurgien-barbier au centre des pays germaniques. Le grand père était chaudronnier : ascendance tout à fait atypique.

Parcours étrange aussi : destiné à une carrière juridique, c'est en cachette de son père qu'il est devenu le plus grand organiste de son temps. On disait que seul Bach l'égalait, et ce n'est pas rien.

Enfin, ces concertos pour orgue et orchestre ne sont pas des oeuvres religieuses. Ils étaient joués pendant les interludes lors des grands oratorios composés par Haendel à Londres, où il s'était finalement installé de manière durable après une parenthèse italienne, venant de sa province germanique.

Au final, ces concertos étaient comme des coupures publicitaires pour ses prochains oratorios : c'est que le grand Haendel, champion de l'orgue, avait de quoi attirer un public supplémentaire important. Pas mal, comme spot de pub.

L'orgue est la vedette de ces pièces, l'orchestre étant destiné à le mettre en valeur mais jamais l'égaler.

Ces pièces courtes - par définition - se jouaient sur des petits orgues mobiles dans de grandes salles dédiées à la musique. Elles profitaient de l'orchestre et de l'installation des grands oratorios pendant les changement d'installation ou de décor. Mais de nos jours, les enregistrements se font aussi dans les églises, car on trouve peu d'orgues ailleurs et les orgues mobiles sont aussi rares.

Cette douzaine de pièces sont formidables : légères, aériennes, virtuoses, d'une expressivité incroyable.

S'y ajoutent des tonalités quasi enfantines car les orgues interprétant cette musique utilisent souvent des jeux d'orgue qui ressemblent à ceux des petits orgues mobiles de l'époque, plutôt aigus, délicats, célestes. Les plus avertis reconnaitront notamment les jeux de flute, voix céleste, viole de gambe, flute traversière, hautbois, voix humaine, trompette, bombarde, clairon, cromorne...

Voici d'abord deux extraits du même morceau, représentatif du rôle de l'orgue dans ces concertos. La première vidéo de 1973 utilise un orgue moderne dont la sonorité est magnifique et bien adaptée au morceau. Cet instrument se trouve à Manchester, dans l'auditorium du conservatoire de musique. La deuxième est un enregistrement de référence de 1986 venu des Pays-Bas.



Et pour donner une vue d'ensemble de ces concertos, voici une intégrale proposée gratuitement par Brilliant Classics. Quelques oeuvres de même facture, notamment un concerto pour harpe, sont ajoutés. Pour l'ensemble, nous sommes partis pour un peu moins de 4 h 30 mn. Bonne écoute !



On peut écouter aussi la première partie des concerts par Marie-Claire Alain, grande organiste, qui fait référence :


Et une version historique de Karl Richter, filmée en 1972, avec l'ensemble de Munich. Le tempo est un peu lent pour les oreilles de 2022, mais elle peut faire référence aussi.



jeudi 3 mars 2022

Sur la Playlist de la fin de l'hiver : Les Messes brèves de Jean-Sébastien Bach

L'Eglise Saint Thomas de Leipzig. 
J.S. Bach est resté dans cette ville de 1728 jusqu'à sa mort en 1750.
 

Les Messes brèves ou Messes luthériennes font partie de ces oeuvres qui vous accompagnent toute votre vie, et on y revient régulièrement, tant la musique qu'elle propose à l'oreille et au cerveau est riche et complexe.

Il s'agit de quatre pièces d'environ une demi-heure - donc brèves - et elles se distinguent de la Messe en si, oeuvre majeure de Bach qu'il a retouchée presque toute sa vie, et qui, elle, dure deux heures. Tout de même.

Par ailleurs, les quatre Messes brèves correspondent au rite luthérien, religion de Bach et de sa famille, alors que la grande Messe en si correspond plutôt au rite catholique, même si Bach l'a écrite aussi pour le luthéranisme. Mais la relative austérité des offices protestants devaient sans doute pas trop s'en accommoder.

Dans tous les cas, ces messes sont en latin et correspondent aux différentes prières de la liturgie chrétienne, partagée entre grande partie entre protestants et catholiques. Ces textes ont perduré jusqu'en 1965, année de la décision d'utiliser les langues usuelles pour dire la messe, au moins chez les catholiques.

Comme on voit, Bach, quoique pieux, n'était pas fanatique en matière de religion, pourvu qu'il puisse produire ses oeuvres et qu'elles soient entendues, que ce soit par des protestants ou par des catholiques.

De fait, l'Allemagne du XVIII° siècle était une vrai mosaïque de petits royaumes, principautés, duchés, certains catholiques et d'autres protestants, selon la tradition des familles régnantes d'ici ou là. Il fallait bien trouver du travail pour les musiciens de l'époque.

Ces Messes brèves sont souvent dédaignées par les musicologues car elles sont une espèce de pot-pourri d'airs repris un peu partout dans l'immense corpus des Cantates, qui ont tant occupé Bach une grande partie de sa vie, car il en fallait une par dimanche, comme responsable musical des offices dans les églises où il était employé. A ce titre, il a composé au total 200 cantates sacrées - destinées à la liturgie et écrites en allemand.

Mais on pourrait tout aussi bien dire que ces Messes brèves sont un vrai Best-of des cantates. Ces messes sont donc en principe le meilleur du meilleur de la musique sacrée de Bach.

Et en les réentendant, on pense forcément à ces dernières paroles prononcées par Jean-Sébastien Bach sur son lit de mort selon la tradition : Ne pleurez pas pour moi : je vais là où la musique est née. Pas mal.

Voici une seule interprétation, celle qui est préférée. Il en existe quelques autres sur internet - mais beaucoup moins que des enregistrements de la grande Messe en si.

Les Messes brèves ont les numéros 233 à 236 dans le catalogue des oeuvres de Jean-Sébastien Bach établi dans les années 1950 et devenu quasi-officiel  (BWV = Bach-Werke-Verzeichnis).

BWV 233

BWV 234

BWV 235

BWV 236

samedi 27 novembre 2021

Sur la Playlist de l'hiver : Jakub Józef Orliński, Album "Anima æterna"


 On s'était promis de revenir à propos de Jakub Józef Orliński à la faveur d'une perle musicale de l'an dernier.

Une fois n'est pas coutume : c'est une nouveauté baroque qui en donne l'occasion. L'Album Anima æterna est son troisième album en solo, et on espère qu'il y en aura beaucoup beaucoup d'autres. D'autant qu'il est né qu'en 1990... De quoi occuper une bonne partie du XXI° siècle.

Pour ceux qui ne le connaissent pas encore, une petite recherche internet devrait vite fait de l'identifier : polonais, contre-ténor, danseur de Break-dance et cool

Il est encore accessible malgré son énorme toute nouvelle renommée, comme on a pu l'aborder lorsqu'il a chanté pas loin d'ici.

On tombera inévitablement sur la vidéo, vue par plus de 8 millions de visiteurs, où il chante à Aix en Provence en tenue de vacancier, persuadé que l'émission n'était que radiophonique alors qu'il dépannait au pied levé France Musique suite à la défection d'un invité.

On pourra aussi regarder la vidéo marrante de 2016, issue du festival de musique ancienne à Utrecht, aux Pays Bas, où il exploite sa voix en même temps que son talent de Break-dancer.

Mais il faut se concentrer sur sa voix, là d'où tout part.

Il chante dans le registre des hautes-contre, donc très aigu mais jamais criarde, toujours juste et toujours masculine. Une voix chaleureuse, souple et toute en nuances : une espèce de miracle qu'on reconnait tout de suite à l'aveugle. Evidemment, ce n'est pas toujours le cas dans la catégorie des contre-ténors car l'exercice est très difficile.

Sans connaître précisément son environnement professionnel et artistique, on sent qu'il est très bien entouré : son répertoire est singulier, magnifique, souvent inédit ou quasiment, pioché dans les meilleurs compositeurs mais moins connus de la période baroque : Zelenka, Fux, Manna par exemple pour cet album. Mais cela ne l'empêche pas d'interpréter aussi sans problème les plus grands : Haendel, Bach et Vivaldi notamment.

Comme toujours, on ne voit pas l'énorme travail artistique et technique que cela suppose, même si les clips tournés dans son salon et sur son piano lors des confinements permettent de l'apercevoir quand il a un peu marre de tourner en rond, alors que manifestement sa vie est sur la scène.

Cerise sur le gâteau, il chante très souvent avec les autres, et dans beaucoup de répertoires, ce qui est signe d'un énorme talent supplémentaire : l'humilité.

Voici quelques morceaux issus de l'album, mais on peut en trouver d'autres facilement sur l'internet.

A écouter lentement, en regardant tomber la première neige... comme aujourd'hui.





samedi 31 juillet 2021

Sur la Playlist de juillet : les frères Sammartini, inconnus du bataillon

On sait que la période baroque est assez longue, du moins telle que les historiens de la musique la caractérise : du début du XVII° jusqu'au milieu du siècle suivant, soit environ 150 ans.

Pendant cette période, on en finit pas d'énumérer tous les compositeurs qui ont laissé une trace de leur musique, sur papier et sur disque. Sans doute plusieurs centaines, d'autant que le baroque s'est répandu dans tous les pays d'Europe et en Amérique latine, comme on l'a vu récemment. 

Par ailleurs, le besoin de musique était immense pour la petite et grande aristocratie, avide de distinction et de distractions, mais aussi avide de ses deniers car on connait peu de compositeurs baroques ayant fait fortune.

Il est sans doute donc pas trop étonnant que l'on tombe sur des compositeurs jamais encore entendus, jamais encore rencontrés, malgré toutes ces dizaines d'années passées à écouter la musique de l'époque.

Avec honte, il faut aujourd'hui consacrer ce message à Guiseppe et Giovanni Sammartini, inconnus au bataillon jusqu'ici.

Guiseppe est l'aîné, né en 1695, et Giovanni est né 5 ans après. Guiseppe a fait sa carrière pour l'essentiel à Londres, où il est mort en 1750, alors que Giovanni est resté toute sa vie à Milan jusqu'à sa mort, à 75 ans... Il reste à savoir si les deux frères ont pu se rencontrer ou correspondre facilement pendant leurs carrières respectives, qui furent très denses des deux côtés.

Le père - Alexis de Saint Martin - était français et hautboïste, établi et italianisé à Milan. Les frontières n'existaient vraiment pas pour ces artistes, dont la mobilité était essentielle pour la plupart d'entre eux. Il fallait bien vivre.

On trouve dans chacune de leur biographie de nombreuses rencontres et coopérations avec les sommités musicales de l'époque, symptômes de leur grande renommée et de la reconnaissance de leur talent : Haendel, Porpora, Bononcini, Farinelli pour Guiseppe, et Glück, Jean-Chrétien Bach, Boccherini pour Giovanni.  L'article de l'Encyclopedia Universalis sur Giovanni indique qu'il a même traité le jeune Haydn de barbouilleur. Toujours aimables, les artistes entre eux.

Il est encore difficile de différencier les oeuvres de l'un et de l'autre : une petite recherche montre vite que certaines sont attribuées soit à l'un, soit à l'autre, de manière indifférenciée. 

Giovanni fut plus prolifique, surtout dans le genre de la Symphonie : on en atteste environ 70 ! Guiseppe quant à lui a composé essentiellement de la musique de chambre : sonates et concertos., toujours en quantité.

Des deux côtés, il reste une musique bien construite, très harmonique et très fluide - et on y entend souvent les tonalités de Haendel et de Haydn selon que l'on entend Guiseppe ou Giovanni. 

De quoi écouter pour le reste de l'été - au moins.




dimanche 6 juin 2021

Sur la Playlist de juin : Zipoli et Hanacpachap cussicuinin

Le blog a déjà fait état de la musique baroque des Andes, produite par les jésuites dans les colonies guaranis comme par un repli étonnant de l'espace et du temps.

C'est ainsi qu'on trouve des formations musicales baroques en Bolivie, au Paraguay et en Argentine, perpétuant cette histoire jusqu'à nos jours.

Et les musiques jésuites missionnaires ne finissent pas d'étonner par leurs couleurs, leurs sonorités, leur singularité : il se passe rarement une saison sans avoir écouté ou réécouté les productions existantes, et il reste encore beaucoup à explorer en la matière.

On peut se mettre dans l'oreille un extrait de la Messe San Ignacio de Domenico Zipoli avec la première vidéo. Ce jésuite toscan, né en 1688, est mort de tuberculose à 37 ans près de Cordoba, dans l'actuelle Argentine, par les hasards de sa mission.

Certains de ses manuscrits ont été retrouvés à Chiquitos en Bolivie actuelle en 1957. 

Il est assez stupéfiant que la musique de ce jeune homme ait pu être diffusée si largement au cœur de l'Amérique de sud, bien après sa disparition.

La deuxième vidéo live et brute perpétue le souvenir de la musique baroque du XVIII° siècle en Amérique du Sud, avec ce commentaire de l'éditeur de la vidéo :

L'Ensemble Moxos est issu de l'école de musique du village de San Ignacio de Moxos, une ancienne mission jésuite de l'Amazonie bolivienne qui a gardé jusqu'à aujourd'hui la tradition culturelle et religieuse léguée par les jésuites depuis sa fondation en 1689. Les flûtes de Pan géantes typiques de la région sont appelées bajones en espagnol.

Après leur expulsion en 1767, les jésuites sont revenus à San Ignacio de Moxos en 1984, l'ancienne église missionnaire a été restaurée et un Musée Archéologique et Religieux conservant plus de 5 000 partitions d'époque a été construit 

La grande fête annuelle du village, la Ichapekene Piesta, a été inscrite sur la liste du Patrimoine Culturel Immatériel de l'Humanité en 2012.

L'Ensemble Moxos a été créé en 2005. 

Direction musicale: Raquel Maldonado Villafuerte

Concert donné à l'UNESCO Paris le 23 octobre 2013 et retransmis en direct sur Bolivia TV.

Enfin, la troisième video reprend le morceau Hanacpachap cussicuinin, issu du rituel catholique péruvien du XVII° siècle. Il constitue la première polyphonie publiée en langue quechua, date attestée de 1631... 

Quel mix musical, à peine sorti de la Renaissance européenne et mâtiné de musique andine !




vendredi 23 avril 2021

Sur la Playlist du printemps : Boccherini, dernier compositeur baroque

Luigi Boccherini est un géant de la musique de chambre - on compte environ 250 oeuvres dans son catalogue. Peut-être est-il le dernier des compositeurs baroques ? Mort au XIX° siècle, en 1805 exactement, son dernier mécène était quand même Lucien Bonaparte, Prince italien à l'époque à l'époque, deuxième frère brouillé de Napoléon.

Né dans une République disparue comme lui, en 1805 - la République de Lucques - Boccherini a beaucoup voyagé entre Italie, Autriche, Espagne, France, dans une Europe en total bouleversement, au diapason de la Révolution française, puis à celui des conquêtes napoléoniennes. Il n'était sans doute pas facile du tout de jouer de la musique dans un tel capharnaüm.

La musique de Boccherini est riche et haute en couleur - les tonalités espagnoles y étant particulièrement notables. Mais surtout, elle est singulière. Est-ce donc l'époque particulière qui la rend si reconnaissable ? Peut-être, car la musique de Boccherini tombe immédiatement dans l'oreille.

Cette musique est inséparable du film Master and Commander, un chef d'oeuvre dédié à la marine de guerre à la voile. Ironie du temps, ce sont les officiers anglais du bord, à la poursuite des Français, qui jouent la musique de Boccherini lors des longues soirées des traversées. On notera que l'action du film se tient en 1805 aussi, l'année de la mort de Boccherini, alors sa musique était déjà célèbre.

Enfin, pour l'anecdote, le corps de Boccherini fut étudié de manière approfondie par une équipe médicale à la fin du XX° siècle. On sait tout de ses petits et gros bobos, mais aussi de la malformation acquise de sa main gauche liée sa pratique intense de la viole de gambe. 

Après ces deux clips du film, on trouvera, de manière plus substantiellement, plus de trois heures de musique de Boccherini.





mercredi 21 avril 2021

Lieux singuliers (1) : l'église Saint Didier d'Asfeld, joyau baroque



Rien de droit, dans l'église d'Asfeld, et rien de comparable avec un autre lieu. 

Edifiée par Jean-Jacques Mesmes, Comte d'Avaux - une localité proche - à la fin du XVII° siècle, en pleine période baroque, son architecte s'inspire du plan d'un instrument de musique, et particulièrement d'une viole de gambe.

Ce petit bijou, superbement conservé, posé au beau milieu d'un coin de campagne au sud du département des Ardennes, à un jet de pierre de la frontière avec l'Aisne. Presque un no man's land, mais on est presque toujours au sud de quelque part, non ?

Plus de photos ici

dimanche 13 décembre 2020

Sur la Playlist : Gottfried Finger, ou Godfrey Finger




Finger est quasi-inconnu en France, même s'il s'agit d'un authentique européen à la sauce du XVIII° siècle. On est toujours frappant par les voyages et séjours différents de ces musiciens de l'époque baroque parcourant l'Europe dans tous les sens, à l'époque où seuls le cheval ou le bateau pouvaient transporter les voyageurs.

Ainsi de Finger, né en Moravie - actuellement République tchèque : on trouve sa trace ensuite à Munich, Londres, Breslau - l'actuelle Wroclaw en Pologne - Vienne, Berlin, Innsbruck, Heidelberg, Mannheim, là où il est mort. 

On trouvait dans toutes ces villes assez de Cours royales ou princières à distraire et à cultiver. Finger a été accueilli notamment à celle de Jacques II, roi d'Angleterre, le dernier des Stuart qui dut fuir en France sous l'aile de Louis XIV, mais Finger de l'a pas suivi. Il y avait sans doute beaucoup trop de concurrence autour de Versailles, ou trop de courbettes à présenter au grand et infernal Jean-Baptiste (Lully), chef de la musique en France de l'époque. 

Ces beaux albums récents se trouvent en totalité sur YouTube. Etonnant, mais tant mieux ! La musique de Finger est limpide, instruite et altière mais toute aussi légère et gaie. Rien à voir avec les lourdeurs et solennelles pompes lullistes. 

Un régal pour l'oreille et l'esprit, si loin des horreurs et de la morosité de l'époque... au final, celles de toutes les époques. Parfait pour une sortie de confinement.



lundi 31 août 2020

C'est nouveau, c'est formidable, c'est La Baroque

Pour tous les amateurs de baroque et tous les autres, voici la dernière née de France Musique, La Baroque, dont le lancement remonte à début juillet.

La programmation est évidemment baroque, mais curieusement, elle comporte aussi pas mal de musique ancienne (d'avant 1600). Bizarrement, le texte initial de présentation de la chaîne ne l'annonce pas, alors que sa description sur le site de France Musique précise : 

Le baroque faisant partie des musiques anciennes, la radio thématique La Baroque vous propose également une sélection d’œuvres allant de la musique médiévale avec Hildegard von Bingen ou Guillaume de Machaut à la musique de la Renaissance avec Clément Janequin ou William Byrd.

L’ensemble des musiques anciennes (musique médiévale, musique de la Renaissance, musique baroque) n'a jamais été aussi actuel. La radio thématique La Baroque, un voyage musical en streaming, sans publicité et gratuit à déguster à toute heure du jour et de la nuit.

Explication un peu tirée sur les cheveux... On sent un programmateur frustré de n'avoir pas pu imposer une autre chaîne dédiée spécifique à la musique ancienne, ou une bataille de chapelle dont le monde de la culture fourmille.

En attendant, on peut apprécier les larges extraits des oeuvres, voire même des oeuvres longues ou intégrales, comme on aime (quand on aime, on ne compte pas !). Les interprétations proposées sont souvent peu connues ou recherchées : un vrai travail de programmation.

A la différence de Radio Swiss Classic - l'ancêtre des radios classiques de service public, le fil d'écoute n'est jamais interrompu : pas d'annonces, pas d'information et c'est tant mieux. On peut évidemment avoir toutes les références des oeuvres écoutées en regarder le site dédié à la chaîne.

Merci au service public : une raison supplémentaire d'acquitter de bon cœur sa redevance audio-visuelle.

dimanche 16 août 2020

Sur la Playlist du week-end... et de beaucoup d'autres jours : Christina Pluhar

Christina Pluhar est une déesse de la musique, et notamment de la musique baroque. Ses instruments (harpe baroque, théorbe, luth) la prédestinaient sans aucun doute à reconstituer les sons de l'époque. On jubile quand on trouve ces sonorités brutes, rocailleuses, et un peu étranges, l'oreille moderne étant habituée aux timbres produits par les orchestres symphoniques hérités du XIX° siècle, codifiés comme une grammaire française.

L'oreille a de quoi de repaître longtemps dans son immense production avec l'Arpegiatta, l'ensemble qu'elle a créé en 2000.

Ces jours-ci on écoutera la musique baroque italienne de la période précoce, juste au tournant du XVII° siècle, 

On trouve beaucoup de choses sur YouTube : cette très longue vidéo (1 h 30) reprenant un concert de 2016 dans le cadre du festival de musique ancienne d'Utrecht (Pays-Bas) est proposée ci-dessous.

Juste en dessous, un extrait du même concert, qui est surtout une facétie des chanteurs et musiciens, parfaitement dans l'esprit du baroque, qui souvent prête à sourire, voire à rire. Et juste après, la même facétie mais enregistrée à Paris, salle Gaveau, le 31 janvier 2012.

Dans la suite, on consacrera une autre publication aux interprétations de Christina Pluhar qu'elle a données des musiques baroques du nouveau monde, dont les sonorités, encore une fois, arrêtent longuement l'oreille, évidemment contaminées par les rythmes et timbres amérindiens.

On y avait déjà consacré il y a longtemps déjà une publication sur le blog sur les musiques baroques d'Amérique du Sud.