Dix centimètres de neige, et tout se désorganise... Les Européens que nous sommes semblent bien douillets et passablement vulnérables, alors que partout ailleurs dans le monde, on sait très bien que la Nature peut être dangereuse, imprévisible, menaçante, in-humaine, au sens littéral du terme.
Mais pourquoi faut-il vouloir nous rendre en toutes circonstances "Maîtres et possesseurs de la Nature", selon le mot de Descartes ? Combien de ravages cet idéal prétendu va-t-il encore continuer de produire ?
Contrairement à ses deux grands ancêtres, Erik Johansson ne dessine ni ne peint. Comme un enfant du XXI° siècle, il travaille la photo numérique, et avec grand talent.
Voici quelques échantillons, où l'on trouvera notamment de forts appels au réalisme magique, ainsi qu'aux univers impossibles, déjà longuement évoqués sur le blog.
On entend souvent en Europe que les américains (comprenez des citoyens des Etats Unis) sont des grands enfants, sans savoir vraiment si c'est un compliment ou un reproche. Ce qui paraît certain, c'est qu'ils ont un certain sens du spectacle, et même une vraie expertise en la matière. Il est quelquefois très surprenant, à leur contact, de constater qu'ils savent à peu près tout sur la production cinématographique US, pourtant volumineuse, et sont capables de citer le moindre acteur ou d'évoquer la carrière du moindre réalisateur.
Ce sens du grand spectacle se retrouve également dans deux attractions touristiques récentes typiques, dont l'évocation même me donne le tournis : le Grand Canyon Sky Walk au dessus du fleuve Colorado, aménagé en 2006, et le Sky Deck de Chicago, ouvert l'été dernier. Les photos sont assez évocatrices... Je laisse le visiteur juge.
On notera que le Sky Walk, est une réalisation de la tribu indienne des Hualapai, située sur leur réserve qui compte quelques milliers de représentants en Arizona autour de la ville de Peach Springs (600 habitants). Comme on l'avait vu pour Foxwoods dans le Connecticut, ce mélange de droit traditionnel et de modernité touristique est très étrange pour l'Européen.
Autun la Romaine et Bibracte la Gauloise sont comme deux soeurs jumelles, aux racines de notre histoire : la ville romaine fut construite de manière splendide pour honorer les Eduens, la puissante tribu gauloise dont la capitale, Bibracte, était toute proche. Puis les deux cultures se sont progressivement fondues en une seule, celle qui porta les cathédrales si haut, bien des siècles plus tard.
D'Autun, on retiendra d'abord les vestiges du formidable amphithéatre qui pouvait dit-on accueillir 20 000 spectateurs, puis une cathédrale sobre, parfaitement équilibrée et splendidement restaurée.
Quant à Bibracte, le site a quelque chose d'exceptionnel. Le panorama du haut du Mont Beuvray n'offre au regard aucun obstacle jusqu'à perte de vue : tout est dominé, tout est visible, toute menace est prévisible... Et les recherches archéologiques continuent. Nous sommes sur un site éminent de la civilisation gauloise, qui enfin commence à être reconnue et étudiée pour elle même.
Le blog s'était déjà arrêté sur le grand Haendel, à propos des opéras Tamerlano et Xerxès. A l'approche de la nativité, il paraît intéressant de proposer une perle musicale issue cette fois-ci de sa musique sacrée, du célébrissime oratorio Le Messie, composé pour la période de Pâques mais habituellement donné depuis pendant l'Avent.
For unto us a child is born en est un morceau de choix, proposé sur l'internet dans des dizaines de versions de toute qualité et de toute facture. On voir au passage à quel point, tout archi connu qu'il soit, l'air peut être difficile et piégeux, compte tenu des horreurs musicales proposées quelquefois.
Dans les onze versions qui suivent, choisies entre tant d'autres, trois mentions particulières.
D'une part à la version du choeur des Mormons, dans le style : plus il y en a, mieux c'est. Ouf ! A quand le Guiness des records par le nombre de chanteurs réunis ? On trouve par ailleurs beaucoup de bondieuseries, surtout venues des Etats Unis, dans les versions vidéos mises en ligne par les internautes, genre enchainement de scènes de la nativité ou diaporama représentant des nouveaux nés sous toutes leurs coutures... Curieuse réminiscence de l'origine de l'oratorio, qui défraya les chroniques au moment de sa sortie, car trop "grand public". Il était d'ailleurs produit dans des salles de spectacles avec force artifices de mise en scène et pas dans les Eglises. Scandale !
Ensuite, ne pas manquer la version de Spinosi, retransmission d'un spectacle au théâtre de Vienne en avril de cette année, qui utilise les chanteurs d'une manière un peu décalée, à la manière d'un opéra, mais sans sacrifier à la qualité musicale .
Enfin, la version de Marcelos Ramos, avec le Choeur Madrigale et l'orchestre symphonique du Minas Gerais, donnée au Grande Teatro Palacio das Artes de Belo Horizonte en décembre 2007, qui dépoussière ce tube de la musique classique par un phrasé tout particulier, tant pour les instruments que pour les choeurs. Etrange. Mais évidemment on peut ne pas aimer.
Pour le reste, on trouvera toutes les grandes interprétations intéressantes. L'Oratorio ayant été composé en anglais à Londres, les versions britanniques sont les plus nombreuses.
Côté technique, les onze versions sont proposées en utilisant la fonction de Playlist (Juke box en français) du site YouTube. Il suffit de passer la souris en bas de la vidéo pour faire apparaitre en miniature les autres versions et de cliquer sur celle que l'on souhaite. Bonne écoute.
D'un voyage à Bruxelles, il reste toujours quelque chose d'intéressant, de décalé, comme si le même esprit un peu fou qui inspirait Magritte continuait de souffler ici et là chez nos amis belges. La dernière fois ne fait pas exception. Voici quelques illustrations vues dans la boutique Dotspot du 53, rue des éperonniers, tout près de la Grand place, et qui ont arrêté l'oeil et l'esprit.
Au menu de ce beau week-end 100% bourguignon, entre autres : Autun la Romaine et Bibracte la Gauloise, aux racines de notre histoire. Et puis la grande forêt morvandelle, à la fois familière et sauvage, comme gravée dans nos gênes d'Européens du Nord de la Loire. Le blog y reviendra évidemment, voici juste quelques images.
Et puisque nous parlons de frontières ces temps-ci, voici quelques images du photographe Nicolas Fussler, remarquée récemment dans une exposition. J'ai en effet exactement le même goût pour les lieux indéfinis, comme entre deux, pour les marches,comme on a déjà vu sur le blog. Lui photographie les postes frontières, et pourquoi pas ?
On se reportera à son site internet pour pouvoir regarder l'ensemble et identifier les lieux. Le blog reviendra sur les frontières bientôt, car son auteur dispose d'un stock d'images sur le même thème.
Vingt ans que ce fameux mur est tombé. Alors souvenons nous un peu, pour une fois,
des trains bloqués à la frontière des deux Allemagnes, dans les aboiements des chiens policiers courant le long de la voie pendant que les voitures étaient fouillées méthodiquement et les miroirs passés sous les essieux
des Vopos (Volkspolizei, les "policiers du peuple") à mitraillette surplombant le départ du train vers l'ouest à la gare de Friedrichstrasse, la dernière avant le capitalisme
des immenses embouteillages à l'entrée de Berlin-Ouest, au débouché des trois autoroutes "extra-terroriales" plaquées sur le territoire de la RDA, qui permettaient le passage de la RFA vers Berlin
de cet étrange silence dans les rues de Berlin Est, compte tenu du faible trafic et de l'immensité des avenues
de ces stations de métro fantômes débouchant à l'Ouest et donc interdites que les trains traversaient dans une indifférence feinte des voyageurs
de ce repos pour l’œil qu'était l'absence quasi totale de panneaux publicitaires
de ces protocoles d'accord traduits longuement dans la nuit glaciale pour régler dans les moindres détails les échanges à réaliser
de cette panique chez nos hôtes quand nous avons demandé l'accès à un photocopieur pour éviter de recopier le protocole : il a fallu 24 heures de délai et nous n'avons pas vu la machine, considérée comme arme stratégique inapprochable
de cette interprète parlant un français parfait mais qui n'était jamais sorti de son pays et n'avait jamais vu un plan de Berlin complet !
de cette parade surréaliste de l'armée populaire, en grand appareillage, devant le mémorial des martyrs du fascisme, en pleine nuit et dans les rues désertes
de la seule attraction possible et passablement ironique après le repas du soir : boire un "Cuba libre" (Coca+rhum) au Palast der Republik (Palais de la république, siège de "l'assemblée populaire" dont une partie était accessible au public)
du vocabulaire choisi de nos interlocuteurs, qui affectaient d'appeler les ordinateurs "Rechner" (calculateurs) au lieu de "Computer", le mot américain utilisé à l'ouest
de cet étrange repas servi dans une Eglise transformée en restaurant, en écoutant "Oxygène" de Jean-Michel Jarre, le régime de l'époque utilisant les artistes français pour contrebalancer l'influence anglo-saxonne qui arrivait à forte puissance par les émissions de radios et de télé à partir de Berlin-Ouest
de cet appartement surchauffé où nous étions logés, obligés que nous étions d'ouvrir les fenêtres alors que la température extérieure étaient négative
de cet étrange sentiment d'avoir entendu à France inter (relayé à Berlin Ouest à l'attention des troupes françaises d'occupation du quartier Napoléon) la sinistre liste des ministres de la première cohabitation du premier mandat de Mitterrand, vieux chevaux sur le retour pour beaucoup d'entre eux... Une autre image de la démocratie, libérale, celle-là... Si proche, si lointaine, là où nous étions
des bâtiments officiels d'Unter den Linden, l'avenue qui menait, côté est, à la porte de Brandebourg alors inapprochable, cœur des organisations associatives communistes, faisant face à l'immense Ambassade de l'URSS, maintenant occupés par des boutiques de luxe
du centre culturel français, face à l'Ambassade de France, Pariser Platz, qui mettait à disposition la presse française, introuvable ailleurs dans toute la RDA... mais encore fallait-il parler français, alors que la seconde langue du pays était évidemment le russe.
de ces écoles, où dans chacune une salle était dédiée à "l'amitié internationale", comprendre bien sûr à chaque fois qu'il s'agissait avec les écoliers d'y célébrer la gloire de l'URSS
Tant d'images encore... Sic transit.
Un vrai morceau du mur, avec un canif
à l'enseigne du quotidien de la RDA,
"Neues Deutschland" (la nouvelle Allemagne)
Les photos personnelles suivantes ont été prises en août 2001
La porte de Brandebourg en réfection, sponsorisée par Deutsche Telekom
"la politique est la continuation de la guerre par d'autres moyens"
(parodie de la fameuses citation de Von Clausewitz :
la guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens)
Images de la galerie de plein air qui réutilise une partie du mur,
près de la gare de l'Est (Ostbahnhof).
C'est la plus longue partie du mur qui a été conservée.
On trouvera d'autres photos personnelles de l'ex-RDA et du nouveau Berlin
Comme pièces de la musique religieuse, les motets visent à glorifier Dieu. Mais pour les Motets de Lully, et surtout les grands Motets - ceux qui comportent la formation musicale la plus riche - on se demande s'ils ne sont pas plutôt directement à la gloire de son représentant sur terre, son Seigneur et Maître le Grand Roy (Prononcez "Roué" s'il vous plaît, on vous l'a déjà dit)
Un portrait de Louis XIV peut-être un peu moins connu que les autres...
Charles Le Brun (1667)
Pastel sur papier-beige, collé par les bords sur carton.
Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques
On a vu en effet sur le blog précédemment à quel point le Surintendant de la musique royale pouvait être d'une servilité totale. De plus, au moment où le Miserere dont on présente les extraits ci-dessous a été composé, il fallait encore, asseoir l'autorité royale face aux évêques. Et Louis triompha encore. Cette musique est comme la célébration de cette victoire : en matière terrestre comme en matière céleste, c'est Louis Dieudonné (son deuxième prénom) qui a la main, et les évêques lui seront soumis.
Voici deux versions du Miserere (Psaume 51), composé en 1664 par un Lully trentenaire, assez curieusement, sans qu'il en ait ni la commande ni le mandat semble-t-il, mais qui fit grosse impression. Il fit pleurer Madame de Sévigné dit-on. Alors sortez vos mouchoirs au cas où et repentez vous, le Miserere, déjà rencontré sur le blog avec Allegri, sert à cela.
Miserere mei, Deus
secundum magnam misericordiam tuam.
Et secundum multitudinem miserationum tuarum
dele iniquitatem meam.
Amplius lava me ab iniquitate mea
et peccato meo munda me.
Quoniam iniquitatem meam ego cognosco
et peccatum meum contra me est semper.
Tibi soli peccavi, et malum coram te feci
ut justificeris in sermonibus tuis, et vincas cum judicaris.
Ecce enim in inquitatibus conceptus sum
et in peccatis concepit me mater mea.
Ecce enim veritatem dilexisti
incerta et occulta sapientiae tuae manifestasti mihi.
Asperges me, Domine, hyssopo,
et mundabor: lavabis me, et super nivem dealbabor.
Auditui meo dabis gaudium et laetitiam
et exsultabunt ossa humiliata.
Averte faciem tuam a peccatis meis
et omnes iniquitates meas dele.
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Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.
Oui, je connais mon péché,
ma faute est toujours devant moi.
Contre toi, et toi seul, j'ai péché,
ce qui est mal à tes yeux, je l'ai fait.
Ainsi, tu peux parler et montrer ta justice,
être juge et montrer ta victoire.
Moi, je suis né dans la faute,
j'étais pécheur dès le sein de ma mère.
Mais tu veux au fond de moi la vérité ;
dans le secret tu m'apprends la sagesse.
Purifie-moi avec l'hysope, et je serais pur ;
lave-moi et je serais blanc, plus que la neige.
Fais que j'entende les chants et la fête :
ils danseront, les os que tu broyais.
Détourne ta face de mes fautes,
enlève tous mes péchés.
Créé en moi un coeur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint.
Version dirigée par Hervé Niquet,
le concert spirituel, éditeur Naxos, 1993
Version Olivier Schneebeli
Centre de musique baroque de Versailles,
éditeur K617, 2002
(utiliser le bouton à droite pour accéder à tous les extraits)
Paradoxal épisode de l'histoire, d'ailleurs popularisée par le film Mission en 1986, que cette création par les jésuites - avec l'approbation du pouvoir colonial espagnol, qui , partout ailleurs autorisait les massacres en masse et la contrainte - de ces petites républiques autonomes, sur les frontières de ce qui est maintenant l'Argentine, le Paraguay, l'Uruguay et le Brésil. Les missions furent fondées officiellement par le pouvoir espagnol en 1606 pour s'éteindre dans la deuxième moitié du XVIII° siècle.
Fondées sur une vision à la fois humaniste et théocratique des indigènes, leur accordant liberté et protection, les "réductions" indigènes étaient tout de même des sortes de réserves, mais elles ont préservé le peuple Guarani de la destruction pure et simple. A l'époque, la règle générale dans la rencontre des peuples, surtout aussi éloignés, étaient la guerre, l'asservissement, le massacre, quand ce n'était pas la maladie infectieuse importée d'Europe : Dieu reconnaitra les siens !
Les missions jésuites ont été rendues possibles du fait d'une conception très large de la divinité que les jésuites ont pu développer, que même Voltaire respectait tant elle était rare.
Les ruines des réductions jésuites, toutes construites sur le même plan ou à peu près, comme dans toute utopie bien organisée, sont classées au patrimoine mondial de l'Unesco.
Les promenades de l'automne méritaient bien une mise à jour de la sélection 2009. Un petit tour à Pierrefonds, le festival de la marionnette à Charleville-Mézières et un beau week-end à Bruxelles ont permis de tester, non sans mal, un tout nouvel appareil dont les subtilités échappent encore en grande partie...