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vendredi 9 décembre 2011

Bureaucratie


Projet photographique un peu foldingue comme on les aime : Jan Banning, photographe néerlandais d'origine indonésienne, a fait une très belle série sur les bureaux, dont voici une sélection. Le bureau, lieu de travail paperassier - o combien dans certaines images - est bien un univers à soi tout seul, très révélateur de la culture qui l'inspire. Un univers du chacun pour soi, accroché à son meuble qui le protège du monde et qui met à distance l'autre : le collègue, l'usager, le demandeur... Tous les clichés sont pris dans des administrations publiques.

Petite sélection parmi 68 beaux portraits, rapportés d'Inde, de France, des Etats-Unis, de Bolivie, du Nigéria, du Yémen, de Chine et de Russie.

Toutes les informations sur chaque image se trouvent sur le site de l'auteur (bandeau en haut de l'image en mode diaporama), y inclus... le salaire de chacun des personnages représentés. Grande leçon d'humilité.

Malgré un travail très important et très singulier, Jan Banning a très peu exposé en France, il sera à Sète pour le festival Images Singulières fin mai/début juin 2012. Il présente en ce moment ses beaux portraits d'immigrés, façonnés à la manière des peintres flamands, dans une galerie d'Amsterdam.















dimanche 9 octobre 2011

Flandres/Vlanderen





Le printemps exceptionnellement beau était l'occasion pour une fois d'aller vers le nord sans crainte des intempéries et de s'acquitter d'une tâche importante : revoir Bruges, Gand et la côte flamande. Réussite totale de cette aventure tranquille, car il vaut mieux pouvoir lever le nez dans ces villes remarquables que la pluie visite tout de même assez régulièrement.

Avec Bruges et Gand, nous sommes dans le patrimoine mondial à deux pieds : tout est classé et il ne reste qu'à en profiter. Les photos diront tout, ou presque. Et le tourisme de mai en semaine, encore très raisonnable, n'a jamais gâché le plaisir.

Quant à la côte, bien sûr, il faut aimer ces immenses plages venteuses, ces stations à l'ancienne à demi-mortes hors saison, cette espèce de vacuité qui laisse l'esprit vagabonder. Moi, j'adore.


samedi 18 septembre 2010

Vermeer ou l'ouverture du Monde






Bon sang que j'aime Vermeer. Cette peinture me retourne à chaque fois : affinité intellectuelle profonde avec l'environnement domestique de mon maître Descartes, qui a passé la plus grande partie de sa vie en Hollande ? Réminiscence personnelle des deux années passées là-bas ? Les deux à la fois ? Et pourquoi aime-t-on les tulipes après tout ?

L'immense renommée deVermeer n'est assise que 45 tableaux dont 35 nous sont parvenus en tout et pour tout. Tout ce qui est rare est cher.

On pourrait faire de cette particularité un fil rouge pour quelques voyages pour tenter de les voir tous : Amsterdam, La Haye, Berlin, Dresde, Brunswick (Braunschweig, près de Hannovre), Francfort, Vienne, Paris, Monaco, Londres, Edimbourg, Blessington (Irlande), New York, Washington et le tour serait fait... A l'exception d'une toile en collection privée - qui est assez riche ou assez chanceux pour avoir cela ? - et d'une autre toile, célébrissime, carrément volée, et assez facilement à ce qu'il parait, le 18 mars 1990 au Musée Isabella Stewart Gardner de Boston et pas encore retrouvée. A quel esthète en chambre profite-elle maintenant ?

Voici dans ce message sept de ces tableaux, soit 20% de la production totale connue de Vermeer. Leur point commun : les reproductions géographiques, fenêtres grandes ouvertes entre le petit monde de ces intérieurs cossus et le vaste Monde, évoquant l'immense richesse de ces marchands pragmatiques, téméraires et passablement avisés qui allaient la chercher partout ailleurs, puis rentraient dans leurs intérieurs une fois fortune faite, acteurs et témoins de cette immense ouverture du monde qu'a connu le XVII° siècle européen, équivalente à notre moderne conquête spatiale.




mercredi 25 mars 2009

Rencontre des cultures : الشاب نجيم

Il faudra bien un jour que la société française arrive à apprécier sa proximité avec les cultures arabes à sa juste valeur. Qu'on le veuille ou non, cette proximité fait désormais partie intégrante du patrimoine culturel national hérité de l'histoire, de la géographie, des mouvements de population entre les deux rives de la Méditerranée.

En effet, dans un monde mondialisé, la familiarité avec d'autres cultures, très différentes à la base, est un bien précieux, et le cadre strictement européen bien étroit, pour une France traditionnellement monolingue et ethnocentrique.




Illustration de cette proximité, voici un clip à l'eau de rose de Cheb Najim/الشاب نجيم, un bébé franco-algérien de 24 ans. Mais qu'on ne s'y trompe pas, il est musicalement très bien entouré, sa voix est intéressante, son expérience musicale est déjà immense et il est en passe un jour de renouveler le genre raï. Le côté kitsch de l'imagerie utilisée est particulièrement attachant : tourné dans un Paris de cartes postales, il évoque à s'en amuser tous les standards du comportement amoureux en pays arabe. ريماس الفنان الفنانة




J'ai personnellement éprouvé cette proximité culturelle lors d'un séjour de découverte du travail social et éducatif aux Pays-Bas. Pendant ce séjour, les collègues néerlandais qui nous accueillaient ont amené la petite délégation française que nous formions dans une maison de quartier fréquentée pour l'essentiel par des ressortissants marocains. Les Marocains arrivaient alors en masse aux Pays-Bas, compte tenu de la fermeture progressive des frontières de tous les autres pays européens.

Au bout de quelques minutes à peine, nous nous sommes brusquement trouvés à parler français, échanger, rire, manipulant les mêmes références et les mêmes codes culturels, avec les Marocains présents, pendant que nos accompagnateurs néerlandais, manifestement ahuris, en étaient réduits à observer passivement cette scène de retrouvailles méditerranéennes que visiblement ils n'avaient pas anticipée - et nous non plus. Bref, nous étions sur la même longueur d'onde spontanément, avec des Marocains que pourtant nous n'avions jamais rencontrés, alors que nos amis bataves ne présentaient le visage que de tristes nordiques.

Nous étions ce jour là infiniment plus proches des Marocains que nous ne l'étions de n'importe quel peuple de l'union européenne... à l'exception notable des mes amis belges francophones au moins.


mercredi 26 décembre 2007

Escher (2) : la loi mouvante des séries

Escher est également particulièrement connu et reconnu pour ses frises dont les motifs s'imbriquent les uns dans les autres, soit en restant identiques, soit en se transformant progressivement, selon des modèles mathématiques sous-jacents. Il en a même fait des motifs décoratifs pour carrelages - voir ci-dessus les hippocampes -, fresques ou mosaïques, ainsi de la longue frise qui décore l'intérieur de la grande Poste de La Haye. Si j'ose caricaturer, l'esprit hollandais ne se sépare jamais de trop loin d'une certaine vision utilitaire des choses esthétiques. Des siècles de commerce avec le monde entier font toute la différence.


mercredi 19 décembre 2007

Escher (1) : les univers impossibles


Même sans avoir mémorisé son nom, bien souvent oublié, tout le monde a croisé un jour les univers d'Escher : mondes impossibles, objets improbables, éléments imbriqués les uns dans les autres se transformant progressivement... Il fait partie sans aucun doute des artistes les plus reproduits dans le monde. Ses œuvres sont en quasi totalité très facilement accessibles sur l'internet ici ou là , ce qui est curieux pour un artiste à la famille duquel il faut encore verser des droits. Alors profitons-en !


Néerlandais de nationalité et de naissance, Escher a laissé de multiples traces dans son pays natal : pendant deux années, à la Haye, j'ai eu plaisir tous les matins à passer devant une façade de lycée qu'il avait animé, et de régulièrement contempler la grande frise qui orne l'intérieur du bureau de poste de la Ville.


Contemporain de l'émergence de la science fiction moderne, Escher en est comme l'exacte traduction picturale : un mélange d'authentiques connaissances scientifiques et de scénarios improbables mais vraisemblables. Ce n'est pas pour rien qu'il fut digne membre du collège de Pataphysique. Il faudra y revenir.

Voici pour l'heure ses œuvres les plus connues sur le thème des mondes impossibles : on reprendra certaines autres, dans d'autres genres, plus tard.

Enfin, pour les amateurs - je sais qu'il y en a - est ajoutée la transposition en legos de ces tableaux : mais comment diable ont-ils fait ?





jeudi 18 octobre 2007

De Witte ou l'anti-fanatisme


On se souvient tous d'avoir vu quelque part la reproduction de ces tableaux sans arriver à se rappeller leur auteur. Il s'agit d'Emmanuel De Witte, parfait illustrateur de la Hollande du XVII° siècle, celle où Descartes son contemporain s'était réfugié pour y penser et expérimenter à l'aise, alors que l'inquisition avait quand même encore brulé Giordano Bruno à Rome quelques années auparavant.

De Witte pouvait s'être représenté lui-même en ce jeune homme de dos figuré sur tous ses tableaux. Le même, qu'il se trouve dans un lieu de culte catholique, protestant ou dans une synagogue. Amsterdam aurait-elle eu une mosquée au XVII° siècle, nul doute qu'il s'y serait aussi trouvé ! Belle invocation picturale de cette Hollande commerçante, ouverte, tolérante dans laquelle les Lumières se préparaient déjà.