Les séries de septembre continuent de nous transporter au cœur du chaudron Moyen-Orient. Il y a matière, et pour longtemps.
L'expérience qu'a représenté l'Etat islamique nourrit et nourrira la fiction longtemps, tant il a présenté de réalités terrifiantes et inédites : ainsi, après The State, mini-série britannique et Kalifat, série suédoise, la production française, via Arte, propose No Man's Land. Même s'il faut avoir à l'esprit Le Bureau des Légendes, série à laquelle on ne peut pas ne pas penser compte tenu des thèmes concernés.
Les huit épisodes sont palpitants, soutenus par un scénario bien charpenté, par des moyens évidemment importants et par des acteurs à la hauteur.
Pertinent et principal élément de la série : endosser le point de vue kurde, et notamment celui des unités féminines (Unités de protection de la femme - YPJ) fortement engagées - et au premier rang - contre l'Etat islamique sur le territoire syrien.
Il faut regarder No Man's Land en n'oubliant jamais que les Etats européens ont laissé tomber assez lâchement les Kurdes en les laissant en tête en tête avec le gouvernement turc. Mais on savait depuis longtemps que les Etats sont les plus froids des monstres froids, reprenant, encore une fois, de la fameuse citation de Nietzsche de Ainsi parlait Zarathoustra.
Le récit est épais et fascinant : projeter des européens douillets dans une situation apocalyptique mais réelle et regarder leur transformation, de chaque côté de la ligne de front.
Avec Our Boys, américo-israélienne, nous replongeons directement cette fois sur les relations israélo-palestiniennes telles qu'on les avaient envisagées avec la série Fauda, mais avec une couche réaliste supplémentaire. La série reprend des événements vécus en 2014 en Israël : enlèvement et assassinat de trois jeunes Israéliens par le Hamas, suivi en représailles enlèvement et assassinat d'un jeune Palestinien, mais cette fois par des fondamentalistes juifs.
La reprise régulière des images d'actualité de l'époque apporte une crédibilité énorme au récit. Et on y retrouve cette proximité armée, toujours prête à exploser sous le détonateur des rancœurs séculaires.
On ajoutera deux mini-séries qui valent le coup d'œil : Unorthodox et Intimidation.
Unorthodox est le récit d'une jeune femme s'émancipant de la communauté juive ultra-orthodoxe new-yorkaise. L'exposé est formidablement construit, autour des transformations physiques de la principale actrice, Shira Haas : aucune scène, aucune évocation, aucun dialogue, aucun détail, aucun décor ne parait gratuit au regard du propos suivi, ce qui est exceptionnel dans les séries, souvent trop bavardes. C'est du grand travail.
Intimidation, dont le titre anglais mieux évocateur est The Stranger, est l'adaptation d'un roman récent d'Harlan Cohen (2015) et les amateurs s'y retrouveront. Le ressort du récit est astucieux et original, alors les scénaristes de série policière semblent se fatiguer un peu en ce moment.
Attention, les acteurs sont britanniques et (donc ?) redoutables de talent.