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samedi 15 août 2009

Les femmes qui peignent sont-elle dangereuses ? (2) : Frida Kahlo

Un seul mot s'impose à l'esprit à la vue de la peinture de Frida Kahlo : douleur, douleur et encore douleur. Mais pas une douleur intellectuelle, abstraite, douce, complaisante, s'apitoyant sur elle même : une douleur réelle, incarnée, factuellement figurée, vécue de bout en bout... Pas de tricherie ni de faux semblant et encore moins de fausse élégance, nous sommes dans un ordre esthétique tout à fait spécial et difficile à pénétrer : la beauté du malheur.


La vie de Frida Kahlo a été assez racontée pour qu'on ne s'y appesantisse pas : un vrai roman où l'on croise le Mexique en révolution permanente et "institutionnelle" aussi bien que Léon Trostky en personne juste avant son assassinat, sa majesté André Breton, mais aussi Picasso, Kandinsky, Tanguy, Duchamp... Ce qui s'appelle avoir de l'entregent.

Cependant, ce qu’elle écrit des surréalistes vaut le détour. Sa correspondance a été publiée, et même en livre de poche, mais nous empruntons cette citation littérale sur cet excellent blog littéraire (message du 27 avril 2009) :

...voici ce qu’elle écrit des surréalistes le seize février mil neuf cent trente-neuf à Nickolas Muray, l’un de ses amants (elle est à Paris où André Breton, qui a compris ce que vaut sa peinture, organise sa première exposition européenne) : Quand je suis arrivée, les tableaux étaient encore à la douane, parce que ce f. de p. de Breton n’avait pas pris la peine de les en sortir. Il n’a jamais reçu les photos que tu lui as envoyées il y a des lustres, ou du moins c’est ce qu‘il prétend ; la galerie n’était pas du tout prête pour l’exposition, d’ailleurs ça fait belle lurette que Breton n’a plus de galerie à lui. Bref, j’ai dû attendre pendant des jours et des jours comme une idiote, jusqu’à ce que je fasse connaissance de Marcel Duchamp (un peintre merveilleux), le seul qui ait les pieds sur terre parmi ce tas de fils de pute de surréalistes. Lui, il a tout de suite récupéré mes tableaux et essayé de trouver une galerie. Finalement, une galerie qui s’appelle « Pierre Colle » a accepté cette maudite exposition. Et voilà que maintenant Breton veut exposer à côté de mes tableaux, quatorze portraits du dix-neuvième siècle (mexicains), ainsi que trente-deux photos d’Alvarez Bravo et plein d’objets populaires qu’il a achetés sur les marchés du Mexique, un bric-à-brac de vieilleries, qu’est-ce que tu dis de ça ?

(…)

Bon, il y quelques jours, une fois que tout était plus ou moins réglé, comme je te l’ai expliqué, j’ai appris par Breton que l’associé de Pierre Colle, un vieux bâtard et fils de pute, avait vu mes tableaux et considéré qu’il ne pourrait en exposer que deux, parce que les autres sont trop « choquants » pour le public !! J’aurais voulu tuer ce gars et le bouffer ensuite, mais je suis tellement malade et fatiguée de toute cette affaire que j’ai décidé de tout envoyer au diable et de me tirer de ce foutu Paris avant de perdre la boule. Tu n’as pas idée du genre de salauds que sont ces gens. Ils me donnent envie de vomir. Je ne peux plus supporter ces maudits « intellectuels » de mes deux. C’est vraiment au-dessus de mes forces. Je préfèrerais m’asseoir par terre pour vendre des tortillas au marché de Toluca plutôt que de devoir m’associer à ces putains d’ « artistes » parisiens. Ils passent des heures à réchauffer leurs précieuses fesses aux tables des « cafés », parlent sans discontinuer de la « culture », de « l’art », de la « révolution » et ainsi de suite, en se prenant pour les dieux du monde, en rêvant de choses plus absurdes les unes que les autres et en infectant l’atmosphère avec des théories et encore des théories qui ne deviennent jamais réalité.


Cela ne l'empêchera quand même pas d'être hébergée chez André Breton lors de son voyage à Paris en 1937, et de lui rendre la pareille à Mexico quand celui-ci ira y présenter des conférences un an plus tard.

Il semble qu'aucun tableau de Frida Kahlo ne se trouve en Europe de manière permanente : ceux-ci se distribuent entre le Musée Frida Kahlo, installé dans la Maison bleue de Mexico City où elle vécut et divers musées nord-américains : New-York (MoMA), San Francisco, Washington. On pourra aussi consulter ce beau site créé à l'occasion du centième anniversaire de sa naissance, en 2007.


vendredi 14 août 2009

21° 16 ' 04'' S - 165° 40' 02'' E

Il s'agit bien d'un lieu, très loin d'ici si l'on en croit sa longitude - 16 494 km et 170 m exactement. Un îlot, plus précisément, où l'on a eu l'immense privilège un jour d'anniversaire, de boire une coupe de Champagne frais comme il faut, puis de ramasser les langoustes porcelaine et collecter quelques coquillages comme on n'en trouve que là bas. Loin de tout.

Sa mémoire est revenue aujourd'hui par hasard, comme c'est le cas, de temps en temps malgré le temps qui passe, car on n'oublie pas ces instants là, jamais même, je crois. Alors quelquefois, quand le temps et le moral sont vraiment trop gris (même si ce n'est pas le cas aujourd'hui, je rassure le visiteur) ce souvenir aide à vivre.


Il n'a pas du beaucoup changer cet ilot : il est toujours sur les cartes et les photos satellites - c'est bien lui, sur la photo plus haut - et bien répertorié dans tous les atlas consultables... Alors, savoir qu'il existe bel et bien, pour de vrai, un lieu comme cela, où l'on s'est déjà trouvé, pour mieux jouer avec l'idée de s'y retirer un jour, assurément, c'est important.

mardi 11 août 2009

Où sont les bombes (suite) ?


Il y a un an à peu près, le blog avait déjà dans ce message évoqué le problème de la dissémination nucléaire. Mais que découvre-t-on encore à la lecture de la très sérieuse livraison 2009 de La science au présent, production de l'Encyclopédia Universalis ? Et bien ceci :


Radioactivité : dangers actuels et protection par Jean-Marie Pruvost-Beaurain
éditeur scientifique à l'Encyclopédie Universalis
(pages 213 & 215, passages soulignés pour le blog)

(...) Le 16 juillet 1945, le premier essai de bombe atomique (au plutonium) est effectué dans le désert d'Alamogordo (Nouveau-Mexique) par les Etats Unis d'Amérique. Les 6 et 9 août 1945, deux bombes atomiques sont larguées sur Hiroshima (uranium) et sur Nagasaki (plutonium). (...)

Bon, jusqu'ici, on savait tout cela. Ensuite :


Au total, depuis 1945, plus de 2420 explosions nucléaires ont été conduites dont 543 (...) dans l'atmosphère entre 1945 et 1980 ;

Rebon, ça, on s'en doutait, vu la référence au message blog précédent sur le sujet. Ensuite, ça se corse :

...plus des explosions nucléaires secrètes ou non officiellement reconnues, mais plausibles : explosions souterraines clandestines de faible intensité (vraisemblablement pratiquées par plusieurs pays, dont la France dans la mine de lignite de Gardanne jusqu'en 2002), une bombe à neutron américaine sur l'aéroport de Bagdad en 2003 et une arme nucléaire tactique déclenchée accidentellement par un fort incendie dans un dépôt d'armes américain en Irak en 2006.

Ces armes nucléaires ont provoqué une importante augmentation de la radioactivité terrestre (...) Depuis 1991, des milliers de tonnes d'uranium (probablement plus de 10 000) ont été disséminées, en partie dans l'atmosphère, à cause de l'utilisation, principalement par les Etats Unis d'Amérique, mais aussi par le Royaume Uni, la France et Israël, de bombes et de blindages à l'uranium appauvri ou non (...) dans diverses guerres (...) Lors de l'explosion d'une munition à l'uranium, celui-ci est porté à haute température et volatilisé en nanoparticules dont une partie se dépose localement (sol, eau, êtres vivants, bâtiments, objets, tout est contaminé, y compris les aliments) et le reste est emporté par les vents, un peu plus loin ou à l'autre bout du monde. La quantité de radioactivité ainsi répandue correspondrait à plus de quatre cent mille fois celle de la bombe d'Hiroshima, et plus de dix fois celle provoquée par l'ensemble des essais nucléaires atmosphériques.

Alors hésitons entre deux hypothèses :

- ou bien Monsieur Pruvost-Beaurain a pété un câble et son éditeur pareil pour débiter de telles horreurs (des explosions nucléaires clandestines dans notre beau pays jusqu'en 2002 ? une bombe à neutron qui explose en 2003 ? Une arme nucléaire qui explose accidentellement dans un incendie en 2006 ? Quid ?)

- ou bien nous vivons bel et bien dans un monde de cinglés fous furieux qui jouent sans vergogne avec les armes du diable. Au secours !

Alors, quelle hypothèse faut-il préférer ?

PS : dans un tableau bien fait dans même article, on découvre que la dose mortelle de radiation pour l'être humain est de 4 à 10 Gray (abréviation : Gy, mesure de la quantité d'énergie communiquée à la matière irradiée, autrement dit la dose de radioactivité absorbée), mais que celle des scorpions est de 750 à 1 000. Que les scorpions ont donc un bel avenir devant eux en ce monde !